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Les délais courant à compter du prononcé du jugement et le droit au juge

Qu’un délai de recours coure du jour où la décision est rendue entrave naturellement l’accès au juge si l’intéressé n’est pas informé des voies et délais de recours. Mais l’atteinte au droit au juge n’est cependant pas disproportionnée dès lors que l’intéressé est un professionnel du droit.

Qu’un délai de recours ait pour point de départ le jour du prononcé de la décision est-il contraire aux exigences du droit à un procès équitable ?

Il peut arriver que la loi prévoie que le délai pour former un recours à l’encontre d’une décision coure non pas du jour de sa notification mais de celui de son prononcé (C. pr. civ., art. 528). Tel était le cas de l’appel de la décision rendue en matière de discipline des officiers publics ou ministériels : l’article 36 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif au statut des officiers publics ou ministériels prévoyait ainsi, avant son abrogation par le décret n° 2022-900 du 17 juin 2022 relatif à la déontologie et à la discipline des officiers publics et ministériels, que le délai d’appel courait à l’égard de l’officier public ou ministériel du jour de la décision, quand celle-ci était rendue en présence de l’intéressé ou de son défenseur, ou, dans les autres cas, du jour de la notification qui lui en était faite.

Un notaire, dont l’appel dirigé à l’encontre du jugement prononçant à son égard diverses sanctions disciplinaires avait été déclaré irrecevable comme tardif, avait entrepris de faire valoir que le délai n’avait pu courir à son égard dès lors qu’il n’avait pas été informé à l’audience des voies et délais de recours et qu’il serait contraire au droit au juge qu’un délai de recours puisse courir sans qu’aient été délivrées de telles informations.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi. Elle a commencé par souligner que la disposition litigieuse poursuivait un but légitime de célérité de traitement des poursuites disciplinaires diligentées contre les officiers publics ou ministériels, en vue du prononcé d’un jugement dans un délai raisonnable ; elle a ajouté que l’absence d’information délivrée à l’intéressé quant aux voies et délais de recours applicables à la décision rendue en sa présence ne constituait pas une atteinte disproportionnée à son droit au juge dès lors qu’il était un professionnel du droit, officier public ou ministériel, en mesure d’accomplir les actes de la procédure d’appel dans les formes et délais requis.

La solution appartient à l’histoire car, depuis l’entrée en vigueur du décret n° 2022-900 du 17 juin 2022, le délai d’appel ne court plus qu’à compter de la notification de la décision à l’officier public ou ministériel. Mais les motifs de l’arrêt livrent quelques enseignements généraux qu’il n’est pas inutile de mentionner.

Un but légitime de célérité de la procédure

En énonçant que la fixation au jour du prononcé de la décision du point de départ du délai de recours poursuit un but légitime de célérité de la procédure, la Cour de cassation paraît admettre qu’un tel mécanisme porte, en lui-même, atteinte au droit au juge.

Indéniablement, un délai de recours ne saurait commencer à courir avant même que l’intéressé ait pu...

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