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Délit de pantouflage : application du délit à un membre de l’Autorité de la concurrence

L’article 432-13 du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007, est applicable à un membre d’une autorité administrative indépendante, cette fonction étant englobée dans la notion d’« agent d’une administration publique ». Elle rappelle par ailleurs que cet agent doit avoir assuré, dans le cadre de ses fonctions, la surveillance effective de l’entreprise privée dans laquelle il prend, dans les trois années qui suivent la cessation de ces fonctions, une participation.

En l’espèce, une société a porté plainte et s’est constituée partie civile pour des faits de prise illégale d’intérêts à l’encontre d’un membre du collège du Conseil de la concurrence, devenu l’Autorité de la concurrence, qui a exercé ses fonctions de 1999 à 2012. Se voyant reproché d’avoir, de juillet 2012 à juillet 2015, pris une participation par travail dans une société concurrente, en lui prodiguant, dans le cadre de son activité professionnelle, des conseils et recommandations en matière de droit de la concurrence alors qu’elle avait assuré la surveillance ou le contrôle de cette même entreprise dans le cadre de ses fonctions au sein du Conseil de la concurrence et de l’Autorité de la concurrence, l’ancien membre est mis en examen du chef de prise illégale d’intérêts en janvier 2022.

En avril 2022, la suspecte demande l’annulation de sa mise en examen, ce à quoi la chambre de l’instruction fait droit au motif que l’article 432-13 du code pénal, dans sa rédaction en vigueur à l’époque des faits ne lui serait pas applicable en raison de sa qualité d’ancien membre de l’Autorité de la concurrence pour des actes commis en 2012, non visée par le texte d’incrimination.

Le champ d’application du délit de prise illégale d’intérêt, et particulièrement la question du champ d’application ratione personae, apparaît récurrente. Sa variante, relative à un ancien agent du secteur public, également appelée le « délit de pantouflage », n’échappe pas à ce phénomène – les différentes lois qui se sont succédé, ayant élargi ce champ d’application, en témoignent (Loi org. n° 2013-906 et loi n° 2013-907 du 11 oct. 2013 ; loi n° 2016-483 du 20 avr. 2016 et loi n° 2017-55 du 20 janv. 2017) –, encore moins en l’espèce, bien qu’il ne s’agisse pas du seul point de discussion de l’arrêt.

Le champ d’application ratione personae du délit pris dans sa rédaction antérieure à la loi du 20 janvier 2017

Depuis loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes (JO 21 janv., texte n° 2), l’article 432-13 du code pénal vise expressément les membres d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante, ce qui inclut nécessairement les membres de l’Autorité de la concurrence.

Cette nouvelle écriture signifie-t-elle pour autant que ces membres étaient jusque-là exclus du champ d’application du délit ? Si la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris, en date du 10 janvier 2023, statue par l’affirmative, permettant ainsi l’annulation de la mise en examen mais aussi du placement sous le statut de témoin assisté qui est, en cas d’existence du fondement légal, subsidiairement attribué au suspect, la chambre criminelle a, au contraire, estimé le texte, pris dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007, en vigueur du 27 avril 2007...

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