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Dénonciation du harcèlement : les maux plus forts que les mots

Le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, peu important qu’il n’ait pas qualifié lesdits faits de harcèlement moral lors de leur dénonciation, sauf mauvaise foi.

par Julien Cortotle 23 mai 2023

Au sein du dispositif de lutte contre le harcèlement moral dans l’entreprise (C. trav., art. L. 1152-1 s.), le législateur a prévu des dispositions spécifiques destinées à soutenir ceux qui témoignent ou relatent de tels faits (C. trav., art. L. 1152-2). Le code du travail leur assure la même protection que celle dont bénéficient les personnes ayant subi ou refusé de subir un harcèlement moral (un dispositif similaire existe pour le harcèlement sexuel et les discriminations). Il est ainsi prévu par l’article L. 1152-3 du code du travail que la rupture du contrat de travail du salarié pour avoir relaté de tels agissements est frappée de nullité.

Selon la Cour de cassation, la présence dans la lettre de licenciement d’un grief tiré de la relation des agissements de harcèlement moral par le salarié, dont la mauvaise foi – qui ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce (Soc. 7 févr. 2012, n° 10-18.035, Dalloz actualité, 21 févr. 2012, obs. J. Siro ; D. 2012. 507 ; ibid. 901, obs. P. Lokiec et J. Porta ) – n’est pas démontrée, emporte à lui seul la nullité de plein droit du licenciement (Soc. 10 mars 2009, n° 07-44.092, Dalloz actualité, 24 mars 2009, obs. L. Perrin ; D. 2009. 952, obs. L. Perrin ; RDT 2009. 376, obs. B. Lardy-Pélissier ; ibid. 453, obs. P. Adam ).

En 2017 la Cour de cassation s’était montrée d’une sévérité toute particulière dans la mise en œuvre de cette protection. Elle exigeait en effet que, pour en bénéficier, le salarié ait lui-même expressément qualifié de harcèlement moral les faits qu’il a relatés (Soc. 13 sept. 2017, n° 15-23.045, Dalloz actualité, 6 oct. 2017, obs. J. Cortot ; D. 2017. 1838 ; ibid. 2018. 813, obs. P. Lokiec et J. Porta ; JCP S 2017. 1359, obs. C. Leborgne-Ingelaere ; JSL 2017, n° 439, obs. J.-P. Lhernould ; contra CSBP, n° 300, p. 469, obs. J. Icard). Il fallait donc, selon les hauts magistrats, que dans son propos le salarié ait utilisé l’expression harcèlement moral afin que le dispositif prévu par le législateur s’applique, ce qu’une partie de la doctrine avait vivement critiqué.

Il faut dire que les conséquences pratiques de la solution paraissaient fort malvenues, pour un salarié déjà en difficultés à qui on venait demander de penser, par exemple...

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