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Des nouvelles propositions pour faire avancer la cyberjustice

Dans un rapport, le Club des juristes suggère plusieurs réformes pour muscler la réponse judiciaire face à la cybercriminalité.

par Gabriel Thierryle 29 avril 2021

Deux mois après la présentation par l’Élysée de « l’accélération de sa stratégie nationale en matière de cybersécurité », le Club des juristes appelle le gouvernement à faire de la lutte contre la cybercriminalité « une cause nationale pour 2022 ». Dans un rapport de 46 pages publié mercredi 28 avril, ce think tank juridique suggère en effet plusieurs réformes pour muscler la réponse judiciaire. Les auteurs, pour partie des magistrats et des avocats, proposent une série de dispositions nouvelles pour promouvoir la spécialisation et la formation continue des magistrats du siège et du parquet.

Les rédacteurs militent ainsi pour la création d’une filière de cybermagistrats, le renforcement de la spécialisation d’une chambre du tribunal judiciaire en matière de droit numérique et cybercriminalité, la désignation d’un référent cyber par cour d’appel ou encore la création d’un département numérique et cyber au niveau de la cour d’appel de Paris. Une spécialisation « indispensable pour avoir une vision et une connaissance des modes opératoires des délinquants qui sont de plus en plus sophistiqués, mais également pour gérer la dimension internationale », précise l’avocate générale près la cour d’appel de Paris Myriam Quéméner, citée dans ce document. Le rapport préconise également le recrutement d’assistants spécialisés et l’introduction d’une spécialité sur le numérique et la cybersécurité dans la nomenclature des experts judiciaires.

Signe de l’acuité de la thématique, le procureur de Paris, Rémi Heitz, interviewé dans le rapport, signale une hausse importante des saisines de la section spécialisée du parquet de Paris, J3, devenue le thermomètre judiciaire français de la cybercriminalité. Sept ans après le rapport du magistrat Marc Robert, qui avait préconisé la reconnaissance d’une compétence concurrente nationale à la juridiction parisienne, cette section, intégrée depuis un an au parquet de la Junalco, a vu son volume d’affaires bondir. Alors qu’elle n’avait enregistré que 62 saisines en 2019, la section a été saisie à 397 reprises en 2020 au titre de sa compétence nationale. « Afin de limiter l’ampleur des attaques, nous devons observer finement les techniques utilisées par les hackers, observe le procureur de Paris. Pour ce faire, la centralisation des procédures est un réel atout. »

Un chiffre qui devrait encore doubler cette année, selon les prévisions des magistrats. La section, composée de trois magistrats et de trois assistants spécialisés, se saisit désormais de toutes les procédures relatives à des rançongiciels, des fraudes aux réparations informatiques et de jackpotting. Après avoir mis en place une permanence, J3 se prépare à diffuser un modèle de plainte et une fiche réflexe à destination des services d’enquête. « Il est en effet primordial de pouvoir agir rapidement en effectuant, au plus près de l’attaque, des gels de données auprès des autorités étrangères », souligne le procureur de Paris.