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Article
Disproportion du cautionnement et séparation de biens
Disproportion du cautionnement et séparation de biens
La disproportion éventuelle de l’engagement d’une caution mariée sous le régime de la séparation des biens s’apprécie au regard de ses seuls biens et revenus personnels.
par Jean-Denis Pellierle 18 juin 2018
Il est certaines évidences qui méritent d’être rappelées. Tel est le cas du principe selon lequel la disproportion éventuelle de l’engagement d’une caution mariée sous le régime de la séparation des biens s’apprécie au regard de ses seuls biens et revenus personnels. C’est dans un arrêt du 24 mai 2018 que la chambre commerciale s’est prononcée au regard des faits suivants : le remboursement du prêt consenti suivant un acte notarié du 16 octobre 2007 par la société Caisse de Crédit Mutuel d’Alsace et de Lorraine à une société avait été cautionné par une autre société, qui avait elle-même obtenu la garantie d’un associé de la première société, à hauteur de la somme de 48 300 €. Cette dernière s’étant montrée défaillante, la société caution s’est acquittée de la somme de 36 402,46 € envers la banque, puis a assigné sa propre caution en paiement. Celle-ci a alors opposé le caractère manifestement disproportionné de son engagement.
Les juges du fond l’ont condamnée à payer à la caution solvens la somme de 36 402,46 €, outre intérêts, au motif que, même si son engagement de caution représente deux années et demie de revenus professionnels, il n’est pas manifestement disproportionné à ses biens et revenus, au sens des dispositions de l’article L. 341-4 du code de la consommation, dès lors que son épouse, séparée de biens, perçoit un revenu fixe et est propriétaire d’un bien immobilier, ce qui lui permet de contribuer dans de larges proportions à la subsistance de la famille et d’assurer son logement.
L’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence (Aix-en-Provence, 17 déc. 2015, n° 13/15990, Dalloz jurisprudence) est cassé au visa de l’article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, ensemble l’article 1536 du code civil : après avoir rappelé le principe selon lequel « la disproportion éventuelle de l’engagement d’une caution mariée sous le régime de la séparation des biens s’apprécie au regard de ses seuls biens et revenus personnels », la chambre commerciale considère « qu’en statuant ainsi, alors qu’elle ne pouvait déduire que l’engagement de la caution était proportionné à ses biens et revenus du fait que son conjoint séparé de biens était en mesure de contribuer de manière substantielle aux charges de la vie courante, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
La solution est classique (v. déjà, en ce sens, Civ. 1re, 25 nov. 2015, n° 14-24.800, D. 2016. 1955, obs. P. Crocq ; AJDI 2016. 123 ; v. égal. Lyon, 11 févr. 2016, n° 15/00650, Dalloz jurisprudence). Elle est en outre pleinement justifiée au regard des règles du droit des sûretés combinées à celles des régimes matrimoniaux : d’abord, l’ancien article L. 341-4, devenu l’article L. 332-1 depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 14 mars 2016, prévoit qu’« un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation » (comp. avant-projet de réforme du droit des sûretés...
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