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Dossier de financement et obligation du banquier en matière de crédit à la consommation

Dans un arrêt rendu le 28 mai 2025, la première chambre civile de la Cour de cassation maintient sa jurisprudence sur le formulaire de rétractation en précisant que le dossier de financement ne peut pas corroborer l’offre de crédit puisque celui-ci émane du seul établissement bancaire. 

Les règles relatives au crédit à la consommation sont très exigeantes eu égard aux établissements bancaires dans un but de protection du consommateur à la suite de la directive 2008/48/CE, et ce, au prix d’une « excessive complexité » (J. Calais-Auloy, H. Temple et M. Depincé, Droit de la consommation, 10e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2020, p. 406, n° 360). Le délai de rétractation de l’article L. 312-19 du code de la consommation est ainsi l’une des clefs de voûte de ce dispositif protecteur. C’est précisément ce mécanisme qui se retrouve au cœur de l’affaire étudiée aujourd’hui ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 28 mai 2025 lequel est destiné à la fois au Bulletin et aux très sélectives Lettres de chambre.

Nouvel épisode du « long feuilleton judiciaire relatif au bordereau de rétractation » (G. Legeais, Preuve de la remise par le prêteur de la fiche FIPEN, RTD com. 2023. 708 ), la décision examinée est importante tant pour les conseils des consommateurs que pour les services juridiques des établissements bancaires. On notera également que c’est le premier président de la Cour de cassation lui-même qui a présidé l’audience comme ceci apparaît en en-tête de l’arrêt.

À l’origine du pourvoi, un établissement bancaire consent un crédit à la consommation à deux personnes physiques pour financer une pompe à chaleur. Les emprunteurs deviennent toutefois défaillants. La banque créancière prononce la déchéance du terme et les assigne en paiement. Les défendeurs répliquent durant l’instance que l’établissement bancaire devrait être déchu de son droit aux intérêts dans la mesure où ses obligations issues de l’article L. 312-21 concernant le formulaire détachable de rétractation n’auraient pas été respectées. En cause d’appel, les juges du fond rejettent la demande en déchéance du droit aux intérêts en précisant que la clause par laquelle les emprunteurs reconnaissent avoir reçu une offre préalable dotée de ce formulaire est corroborée par la liasse contractuelle conservée par la banque et versée aux débats. Les emprunteurs se pourvoient en cassation en axant leur raisonnement sur l’insuffisance de ce document.

L’arrêt rendu le 28 mai 2025 est à la fois une confirmation de jurisprudence mais également une continuation de celle-ci à travers une précision nouvelle s’agissant du document de financement produit par la banque. Étudions pourquoi.

Une jurisprudence désormais constante

Depuis maintenant plusieurs années, la première chambre civile a pu préciser à plusieurs reprises que « la signature par l’emprunteur de l’offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations, lui a remis la fiche précontractuelle d’information normalisée européenne, constitue seulement un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires » (Civ. 1re, 21 oct. 2020, n° 19-18.971, nous soulignons, Dalloz actualité, 16 nov. 2020, obs. J.-D. Pellier ; D. 2021. 63 , note G. Lardeux ; ibid. 1890, obs. D. R. Martin et H. Synvet ; Rev. prat. rec. 2021. 25, chron. V. Valette-Ercole ; RTD com. 2020. 932, obs. D. Legeais ; 7 juin 2023, n° 22-15.552, Dalloz actualité, 15 juin 2023, obs. C. Hélaine ; D. 2023. 1632 , note J. Lasserre Capdeville ; RTD civ. 2023. 709, obs. J. Klein ; RTD com. 2023. 708, obs. D. Legeais ; Gaz. Pal. 2024, n° 34, p. 8, obs. S. Piedelièvre). Sans surprise, nous retrouvons donc ces deux références jurisprudentielles déployées au sein de la motivation enrichie de la décision étudiée aujourd’hui. Ces solutions poursuivent l’interprétation donnée par la Cour de justice de l’Union européenne de la directive 2008/48/CE relative aux crédits à la consommation (v. CJUE 18 déc. 2014, aff. C-449/13, D. 2015. 715 , note G. Poissonnier ; ibid. 588, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ; RTD com. 2015. 138, obs. D. Legeais ; v. égal., Civ. 1re, 5 juin 2019, n° 17-27.066, Dalloz actualité, 3 juill. 2019, obs. J.-D. Pellier ; D. 2019. 1746 , note G. Poissonnier ; ibid. 2020. 170, obs. J.-D. Bretzner et A. Aynès ; ibid. 624, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ).

En ce sens, l’arrêt du 28 mai 2025...

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