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Droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique : projet de loi ratifiant l’ordonnance du 24 novembre 2021

Enregistré à la présidence du Sénat le 23 février 2022, un projet de loi vise à ratifier l’ordonnance n° 2021-1518 du 24 novembre 2021 complétant la transposition de la directive 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique.

Prévoyant des mesures visant à adapter les exceptions et limitations à l’environnement numérique et transfrontière et à améliorer les pratiques en matière d’octroi de licences pour un accès plus large aux contenus, la directive dite « Damun » (dir. [UE] n° 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avr. 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE) a déjà fait l’objet de premières transpositions. D’une part, la loi du 24 juillet 2019 a créé un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse (v. L. n° 2019-775 du 24 juill. 2019). Prévu à l’article 15 de la directive, ce droit voisin a été créé au profit des agences et éditeurs de presse pour assurer une meilleure protection de leurs contenus en protégeant leurs investissements et pour répondre à une problématique importante : les moteurs de recherche reproduisent et diffusent, comme libres de droits, des textes, photographies et vidéographies sans licence, créant un préjudice évident pour les agences et éditeurs de presse, d’autre part, l’ordonnance du 12 mai 2021 transpose notamment des dispositions relatives à la responsabilité des plateformes (v. ord. n° 2021-580 du 12 mai 2021 portant transposition du 6 de l’article 2 et des articles 17 à 23 de la directive 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE).

L’ordonnance n° 2021-1518 du 24 novembre 2021 poursuit et achève donc ce travail de transposition, dont l’échéance était fixée au 7 juin 2021. Le projet de loi déposé au Sénat le 23 février 2022 ne compte qu’un article unique ratifiant, sans modification, l’ordonnance. Il doit être déposé devant le Parlement au plus tard quatre mois à compter de la publication.

Avant d’y revenir plus en détail, rappelons succinctement que parmi les principaux apports, l’ordonnance consacre de nouvelles exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins (fouille de textes et de données, utilisation d’extraits d’œuvres à des fins d’illustration dans le cadre de l’enseignement et reproduction des œuvres dans un souci de conservation du patrimoine culturel). L’ordonnance vise également à élargir l’accès aux œuvres par le biais de licences collectives et instaure un nouveau système permettant aux bibliothèques et musées de numériser et de diffuser des œuvres dites « indisponibles ». Elle prévoit enfin la possibilité d’octroyer des licences collectives étendues : un organisme de gestion collective pouvant désormais négocier un accord non seulement au profit de ses membres, mais aussi des auteurs non adhérents.

Exception à des fins d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la formation professionnelle

Si le code de la propriété intellectuelle visait déjà l’exception pédagogique (v. art. L. 122-5, 3°, e : la représentation ou la reproduction d’extraits d’œuvres, sous réserve des œuvres conçues à des fins pédagogiques), l’ordonnance définit un nouveau cadre juridique pour les utilisations d’extraits d’œuvres sous forme numérique. Elle autorise les enseignants à utiliser des extraits d’œuvres à des fins pédagogiques afin d’illustrer leurs cours, y compris dans un contexte numérique.

L’ordonnance crée ainsi une exception et ajoute un point 12 à l’article L. 122-5. L’auteur ne peut donc pas interdire « la représentation ou la reproduction d’extraits d’œuvres à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la formation professionnelle ». Étendant l’application aux droits voisins et au droit sui generis du producteur de base de données (v. ord., art. 7 et 11), l’ordonnance précise également les modalités d’application de l’exception dans un nouvel article L. 122-5-4. Celle-ci ne concerne toutefois ni les œuvres conçues à des fins pédagogiques ni les partitions de musique.

Ainsi, et à condition qu’aucun but commercial ne soit poursuivi, l’utilisation d’extraits d’œuvres pourra être réalisée sans autorisation des auteurs à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la formation professionnelle (y dans le cadre de l’apprentissage). On y ajoute également la possibilité d’utiliser ces extraits pour l’élaboration et la diffusion de sujets d’examens ou de concours organisés dans le prolongement des enseignements. En revanche, l’ordonnance exclut toute activité à but récréatif.

L’article L. 122-5-4 précise alors que les actes de représentation ou de...

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