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Droit d’auteur : la liberté d’expression ne fait pas exception
Droit d’auteur : la liberté d’expression ne fait pas exception
Le Tribunal judiciaire de Paris a récemment rappelé que la liberté d’expression, même dans le contexte d’un débat d’intérêt général, n’autorise pas à s’affranchir purement et simplement des règles du droit d’auteur.
par Thomas Lemieux, Enseignant-chercheur au CEIPIle 10 mars 2025
En 2021, un candidat avait annoncé sa volonté de participer aux élections présidentielles dans un film diffusé sur le site de son parti politique. Ce film reprenait notamment des passages d’un film documentaire sur un agriculteur. La société de production du film a mis en demeure le candidat, le parti politique et la directrice de publication du site internet de cesser la diffusion de la vidéo qu’elle considérait comme portant atteinte à ces droits et à ceux du réalisateur du film. Face à l’absence de réaction, la société de production et le réalisateur du film ont saisi le Tribunal judiciaire de Paris, à titre principal pour contrefaçon de leurs droits d’auteur et droits voisins.
Les défendeurs, eux, considéraient qu’il n’y avait pas d’atteinte au droit et demandaient au tribunal de rejeter les demandes. Bien plus, ils considéraient que la procédure constituait une « tentative d’entrave à la liberté d’expression d’un parti politique en période électorale » susceptible de donner lieu à l’attribution de dommages et intérêts – 20 000 € étaient demandés. Les défendeurs souhaitaient donc déplacer le débat sur le terrain des droits fondamentaux et plus particulièrement celui du conflit entre droit d’auteur et liberté d’expression.
L’argument a créé de la confusion dans le raisonnement des juges. Après avoir fait droit à la fin de non-recevoir contestant l’assignation de la directrice de publication du site internet – point qui ne sera pas commenté –, le tribunal suit un raisonnement de droit d’auteur clair et précis. En revanche, le contrôle de proportionnalité effectué ensuite est plus confus. Pourtant la solution est nette : la liberté d’expression ne pouvait ici justifier la contrefaçon, le candidat ayant tout à fait la possibilité de déclarer sa candidature dans une vidéo respectant le droit d’auteur.
Puisque le tribunal applique les règles du droit d’auteur avec clarté et simplicité, il aurait pu, en restant dans le cadre du code de la propriété intellectuelle, éviter l’écueil du contrôle de proportionnalité.
L’application claire des règles du droit d’auteur
La reprise d’images d’une œuvre audiovisuelle originale n’étant pas contestée, les défendeurs invoquaient la théorie de l’accessoire et l’exception de courte citation. Le débat sur ces aspects de droit d’auteur était clair et le tribunal se prononce sans difficulté : la théorie de l’accessoire est écartée, l’exception de courte citation rejetée.
La théorie de l’accessoire écartée
Les défendeurs tentaient tout d’abord d’échapper à l’application du droit d’auteur en invoquant la théorie de l’accessoire. Sur ce point, les juges se réfèrent à une jurisprudence constante selon laquelle il n’y a pas de communication au public lorsqu’une reproduction est accessoire tant par rapport au sujet traité que par rapport au sujet représenté, en ce qu’elle est imbriquée avec le sujet traité et que cette communication accessoire ne porte pas atteinte au monopole du droit d’auteur.
Les juges utilisent donc la théorie de l’accessoire comme limite interne du droit de reproduction (v. en ce sens, M. Vivant et J.-M. Bruguière, Droit d’auteur et droits voisins, 4e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2024, nos 646 s.) bien que cette position reste discutée (v. par ex., A. Lucas, A. Lucas-Schloetter et C. Bernault, Traité de la propriété littéraire et artistique, 5e éd., LexisNexis, 2017, n° 351, pour qui il s’agit d’une exception prétorienne au droit de reproduction). Le tribunal relève alors le caractère documentaire du film et le fait que les extraits ont été intégrés à une vidéo présentant un caractère politique. Les juges soulignent surtout la contradiction entre l’invocation du caractère accessoire de la reproduction et la déclaration du candidat reconnaissant l’adéquation entre les images et son discours.
L’œuvre ayant été reprise à dessein, elle a bien été reproduite au sens du code de la propriété intellectuelle.
L’exception de courte citation rejetée
Pour éviter la qualification de contrefaçon, les défendeurs faisaient ensuite valoir que l’exception de courte citation de l’article L. 122-5, 3°, a, du code de la propriété intellectuelle trouvait ici à s’appliquer. Cependant, celle-ci est prestement rejetée. En effet, le nom de l’auteur de l’œuvre citée n’étant pas indiqué, la condition première de l’exception est absente. La reproduction en cause ne peut donc entrer dans le cadre de l’exception de courte citation.
Le nom de l’auteur n’étant pas indiqué – seuls le titre du film et la chaîne source sont cités sur le site du parti politique – les juges constatent l’atteinte au droit de paternité. L’acte de contrefaçon est ainsi dûment établi : la vidéo litigieuse porte atteinte tant au droit de reproduction qu’au droit de paternité.
L’affaire semblait simple. Cependant, dans une ultime tentative d’échapper aux sanctions du droit d’auteur, les défendeurs se réfugiaient derrière la liberté d’expression.
L’application superflue de la proportionnalité
Les juges se laissent ici entraîner...
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