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Droit voisin des éditeurs de presse : Google de nouveau sanctionné par l’Autorité de la concurrence

L’Autorité de la concurrence a rendu une décision sanctionnant Google à hauteur de 250 millions d’euros au motif que l’entreprise n’a pas respecté ses engagements pris en 2022 qui visaient à garantir la mise en œuvre du droit voisin des éditeurs de presse par des négociations menées de bonne foi.

par Ophélie Wang, Docteure en droitle 23 avril 2024

La décision du 15 mars dernier constitue le dernier épisode d’une procédure initiée en 2019, après la transposition en droit français, par la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019, du droit voisin des agences et des éditeurs de presse créé par la directive européenne de 2019 (Dir. [UE] 2019/790 du 17 avr. 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique). Ce nouveau droit voisin prévoit que « l’autorisation de l’éditeur de presse ou de l’agence de presse est requise avant toute reproduction ou communication au public totale ou partielle de ses publications de presse sous une forme numérique par un service de communication au public en ligne » (CPI, art. L. 218-2). Il a été créé expressément dans le but de permettre aux éditeurs et agences de percevoir une rémunération pour l’indexation de leurs contenus par des services tels que Google Search ou Google Actualités. Quelques mois après la transposition, plusieurs syndicats d’éditeurs de presse avaient saisi l’Autorité de la concurrence au motif que les négociations avec Google sur la rémunération due au titre de ce nouveau droit voisin n’étaient pas menées de bonne foi – Google n’ayant proposé qu’un contrat de licence standard qui prévoyait l’autorisation, pour l’entreprise, de reproduire et communiquer des extraits d’articles de presse à titre gratuit.

Cette saisine aboutit à des mesures d’urgence prises par l’Autorité en 2020 (décis. 20-MC-01 du 9 avr. 2020, Dalloz actualité, 11 mai 2020, obs. F. Masmi-Dazi ; D. 2020. 1181, point de vue J.-C. Roda ; Dalloz IP/IT 2020. 560, obs. S. Dormont ; Légipresse 2020. 288, étude A.-S. Choné-Grimaldi ; ibid. 314, étude E. Derieux ; RTD com. 2020. 806, obs. E. Claudel ; confirmée par l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 8 oct. 2020, n° 20/08071, Dalloz IP/IT 2020. 588, obs. N. Maximin ; Légipresse 2020. 605, étude A.-S. Choné-Grimaldi ; ibid. 2021. 291, étude N. Mallet-Poujol ; RTD com. 2020. 806, obs. E. Claudel ) puis à une première condamnation de Google pour le non-respect de ces mesures en 2021 (décis. 21-D-17 du 12 juill. 2021, Dalloz actualité, 23 juill. 2021, obs. F. Masmi-Dazi ; D. 2021. 1591, point de vue A. Mendoza-Caminade ; ibid. 1624, entretien J. Larrieu ; Légipresse 2021. 395 et les obs. ). Au fond, l’Autorité de la concurrence a ensuite pris une décision (décis. 22-D-13 du 21 juin 2022, Dalloz IP/IT 2022. 406, obs. E. Rançon ) validant une série d’engagements proposés par Google, au titre desquels l’entreprise s’engageait notamment à « négocier de bonne foi, avec les agences et éditeurs de presse qui en feraient la demande, la rémunération due pour toute reprise de contenus protégés sur ses services, conformément aux modalités prévues par l’article L. 218-4 du code de la propriété intellectuelle et selon des critères transparents, objectifs et non discriminatoires » (premier engagement).

La présente décision résulte d’une transaction avec l’entreprise Google et lui impose une sanction financière de 250 millions d’euros pour le non-respect des engagements pris en 2022, et en particulier de ce premier engagement sus-cité.

Une procédure initiée par l’Autorité de la concurrence

Avant de nous intéresser au fond, nous pouvons faire une première observation sur la procédure qui a mené à cette décision et de ce qu’elle révèle sur la position très volontariste adoptée par l’Autorité de la concurrence. En effet, alors que les décisions précédentes avaient été rendues à la suite d’une saisine de syndicat d’éditeurs de presse, la présente procédure a été initiée par l’Autorité elle-même.

Cette prise d’initiative est notable, non seulement parce qu’aucun des acteurs du secteur de la presse ne s’est plaint des agissements de Google, mais aussi parce que le respect des engagements devait être contrôlé par un mandataire...

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