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Effet de la nullité pour fausse déclaration du contrat d’assurance automobile obligatoire : la qualité de victime tient en échec celle de souscripteur

Sauf abus de droit, l’assureur automobile ne peut opposer à la victime d’un accident de la circulation la fausse déclaration intentionnelle qu’elle a faite lors de la souscription du contrat d’assurance ni obtenir auprès d’elle le remboursement des sommes versées en application du contrat.

L’article 113-8 du code des assurances prévoit la nullité du contrat d’assurance « en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre ». Générale, la solution bien connue trouve à s’appliquer y compris à l’égard de la victime de l’assurance de responsabilité (Civ. 1re, 23 juin 1971, n° 70-10.512). Encore que… le droit français n’est pas une île et, chose bien connue encore, le droit de l’Union européenne ne craint pas de troubler les certitudes nationales. 

La protection de la victime de mauvaise foi

L’article 3 de la directive 2009/103/CE du 16 septembre 2009 concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette responsabilité exige des États qu’ils prennent « toutes les mesures appropriées (…) pour que la responsabilité civile relative à la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel sur [leur] territoire soit couverte par une assurance ». Quant à l’article 13, il exige des États que ceux-ci paralysent les dispositions légales ou contractuelles excluant, au détriment des victimes, la couverture à raison des circonstances particulières de survenance l’accident (par ex., utilisation non autorisée du véhicule par l’auteur du dommage, conduite sans permis…). L’assurance obligatoire ainsi considérée ne pouvant être entendue comme le fonds de garantie prévu à l’article 10 de la même directive dont « l’intervention a été conçue comme une mesure de dernier recours » (CJUE 20 juill. 2017, aff. C-287/16, pt 35), la Cour de justice de l’Union européenne décida, au regard de l’objectif de protection des victimes qui anime la directive, que l’article 3 de celle-ci s’oppose à une réglementation nationale qui aurait pour effet de rendre opposable à la victime la nullité du contrat d’assurance (CJUE 20 juill. 2017, préc.), y compris lorsque ladite victime est elle-même le preneur d’assurance et le propriétaire du véhicule concerné (CJUE 14 sept. 2017, aff. C-503/16). La Cour de cassation s’aligna : interprétant la loi nationale « à la lumière » de la directive, elle jugea que « la nullité édictée par l’article L. 113-8 du code des assurances n’est pas opposable aux victimes d’un accident de la circulation ou à leurs ayants droit (Civ. 2e, 29 août 2019, n° 18-14.768, Dalloz actualité, 20 sept. 2019, obs. R. Bigot ; D. 2019. 1652 ; ibid. 2020. 1205, obs. M. Bacache, D. Noguéro et P. Pierre ; bjda.fr 2019, n° 65, obs. A. Cayol). Ce faisant, elle libéra le Fonds de garanties des assurances obligatoires (FGAO) de la prise en charge de...

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