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Escroquerie aux prêts par faux documents : la banque n’est pas fautive

Aucune faute ne peut être imputée aux établissements de crédit ayant accordé des prêts immobiliers dès lors que le demandeur produisait des pièces falsifiées mais de très bonne facture, réalisées au moyen d’une imprimante offset, et que le dossier ne présentait ni incohérences ni anomalies

par Warren Azoulayle 18 avril 2018

Les comportements mensongers ayant recours aux faux usent d’un procédé leur permettant de « détruire, altérer ou obscurcir la vérité au préjudice de quelqu’un […] dans le dessein de le tromper » (v. D. Jousse, Traité de la justice criminelle en France, 4 t., 1771, éd. Debure père, t. III, p. 341). La puissance victimale de la partie civile et le seuil d’injustice seront fonction, entre autres, de ce que le dommage subit peut être qualifié d’intolérable (v. B. Bernabé, L’avènement juridique de la victime, Doc. fr., coll. « Histoire de la justice », n° 25, 2015, p. 5). La haute juridiction a alors été saisie afin d’apprécier l’existence d’une faute de la victime afin de déterminer le niveau de réparation du préjudice causé par l’auteur d’une infraction d’atteinte aux biens.

En l’espèce, deux emprunteurs constituaient leurs dossiers de demande de prêts immobiliers auprès de deux établissements bancaires à l’aide de documents falsifiés. Ne parvenant pas à recouvrir les échéances des prêts octroyés, les banques déposaient plainte et sollicitaient le paiement des sommes escroquées ainsi que la réparation de leur préjudice. Le tribunal correctionnel les reconnaissant coupables d’escroquerie prononçait une condamnation solidaire des prévenus devant payer les sommes de 542 999,11 € pour la première banque, et de 400 000 € pour la seconde. Ils interjetaient appel la décision et les juges du second degré révisaient ces montants. Le premier était ramené à 306 746,72 €, déduction étant faite des remboursements déjà réalisés et du produit de la vente réalisé sur adjudication d’un bien immobilier. La cour d’appel considérait que les demandes fondées sur la mise en œuvre d’intérêts au taux contractuel ou d’indemnités conventionnelles ne sauraient être recevables puisque la victime d’une escroquerie entendant obtenir réparation de son dommage par la voie civile ne saurait être fondée à poursuivre dans ce cadre l’exécution d’une convention que la condamnation annihile. Le second était porté à 486 221,14 €, soit le capital restant dû des 490 000 € empruntés qu’il n’était pas possible de limiter en première instance sans motivation. En outre, si les appelants invoquaient la commission de plusieurs fautes par les établissements ayant concouru à la constitution ou à l’aggravation du dommage causé par leur infraction, les juges du fond battaient cette argumentation en brèche...

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