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Filiation : application cumulative des lois personnelles du parent et de l’enfant

La contestation d’une reconnaissance de paternité n’est possible que si elle est admise tant par la loi personnelle de son auteur que par celle de l’enfant. La cour d’appel qui n’applique que la loi française sans rechercher d’office le contenu de la loi étrangère viole les articles 3 et 311-17 du code civil.

par Véronique Mikalef-Toudicle 21 juin 2019

Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 3 janvier 1972, le code civil consacre une section au « conflit des lois relatives à la filiation » aux articles 311-14 à 311-17. Le législateur privilégie l’intérêt de l’enfant en cherchant, tout à la fois, à faciliter l’établissement de sa filiation et à en limiter la contestation. Une reconnaissance de paternité ou maternité peut être remise en cause par une demande en nullité ou une contestation. Il est admis (V. not. Civ. 1re, 15 mai 2013, n° 11-12.569, D. 2013. 1208 ; ibid. 2014. 1059, obs. H. Gaudemet-Tallon et F. Jault-Seseke ; AJ fam. 2013. 379, obs. C. Gatto ; Rev. crit. DIP 2014. 92, note E. Gallant ; RTD civ. 2013. 586, obs. J. Hauser ; 6 juill. 1999, n° 97-19.453, D. 1999. 483 , concl. J. Sainte-Rose ; ibid. 2000. 162, obs. A. Bottiau ; JCP 2000. II. 10353, note Vignal ; Defrénois 2000. 109, obs. J. Massip ; Dr. fam., avr. 2000. 24, note H. Fulchiron ; JCP 2000. II. 10353, obs. T. Vignal. V. depuis, Paris, 13 déc. 2007, Dr. fam. 2008. Comm. 113, note M. Farge ; TGI Paris, 23 nov. 1993, D. 1995. 306 , note S. Aubert ; Rev. crit. DIP 1995. 703, note J. Foyer ; 29 nov. 1994, Rev. crit. DIP 1995. 703, note J. Foyer ; Paris, 16 avr. 1996, D. 1997. 344 , note S. Aubert ; ibid. 156, obs. F. Granet . Mais contra, antérieurement, Paris, 11 mai 1976, D. 1976. 633, note Massip ; Rev. crit. DIP 1977. 109, note Fadlallah ; JDI 1977. 656, note J. Foyer) que ces deux actions relèvent de l’article 311-17 du code civil selon lequel « la reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si elle a été faite en conformité, soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi personnelle de l’enfant ». Mais, en cas de divergence entre la loi personnelle de l’auteur et celle de l’enfant, faut-il appliquer cumulativement les deux lois ? C’est à cette question que la Cour de cassation répond une nouvelle fois dans l’arrêt commenté.

En l’espèce, une jeune femme est née à Barcelone en 1992. Un ressortissant français l’a reconnu. En 2010, cet homme décède et ses frères et sœurs contestent la reconnaissance de paternité et sollicitent une expertise biologique destinée à démontrer que le défunt n’était pas le père de la jeune femme. Dans un arrêt avant dire droit du 6 mai 2015, la cour d’appel de Montpellier déclare l’action en contestation de la reconnaissance recevable et ordonne une expertise génétique. Les juges du fond appliquent la règle de droit français selon laquelle tout intéressé peut contester une filiation pendant un délai de dix ans quand il n’existe pas de possession d’état conforme au titre. En l’espèce, le délai a commencé à courir le 1er janvier 2006, jour de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 4 juillet 2006 (texte ayant réduit le délai de trente à dix ans) et n’était pas écoulé au jour de l’assignation. Les frères et sœurs justifient d’un intérêt successoral puisqu’ils sont écartés de la succession en présence d’un descendant du défunt. Dans un second arrêt du 19 avril 2017, la cour d’appel de Montpellier annule la reconnaissance et dit que la jeune femme n’est pas l’enfant...

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