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Fins de non-recevoir tirées des demandes nouvelles et de la concentration des prétentions au fond, c’est la Cour qui reçoit !

Juridique un peu, pratique et politique surtout, la Cour de cassation tranche la question controversée de la compétence à statuer sur la recevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel et la concentration des prétentions au fond : 1/ Par renvoi de l’article 907 du code de procédure civile, l’article 789, 6°, du code de procédure civile est applicable devant le conseiller de la mise en état, sans que l’article 914 du même code n’en restreigne l’étendue. 2/ Les fins de non-recevoir tirées des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile relèvent de la compétence de la cour d’appel.

Le 6 juillet 2022, un conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris présente une demande d’avis sur l’application stricte de l’article 914 du code de procédure civile qui définit ses compétences, sa compétence à statuer sur la recevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel (C. pr. civ., art. 564) et des prétentions au fond présentées postérieurement à la remise des conclusions dans les délais imposés (C. pr. civ., art. 910-4). Pour paraître isolée, la démarche n’était pas celle d’un seul, elle était celle de tous. Depuis 2020, doctrine, avocats et magistrats étaient partagés sur la compétence à statuer sur ces deux fins de non-recevoir habituelles en appel. C’est l’une de ses vertus que de mettre fin aux divisions, la Cour de cassation livre un avis empreint d’une motivation très affirmative :

« 3. L’article 789, 6°, du code de procédure civile, modifié par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, dispose que “Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir.”

4. Par renvoi de l’article 907 du code de procédure civile, ce texte est applicable devant le conseiller de la mise en état, sans que l’article 914 du même code n’en restreigne l’étendue.

5. En premier lieu, ainsi qu’il l’a été rappelé dans l’avis rendu par la deuxième chambre civile le 3 juin 2021 (n° 21-70.006, Dalloz actualité, 18 juin 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2021. 1139 ; ibid. 2272, obs. T. Clay ; ibid. 2022. 625, obs. N. Fricero ), publié, le conseiller de la mise en état est un magistrat de la cour d’appel chargé de l’instruction de l’appel. Conformément à l’article L. 311-1 du code de l’organisation judiciaire, la cour d’appel est, quant à elle, compétente pour connaître des décisions rendues en premier ressort et statuer souverainement sur le fond des affaires.

6. Il en résulte que la cour d’appel est compétente pour statuer sur des fins de non-recevoir relevant de l’appel, celles touchant à la procédure d’appel étant de la compétence du conseiller de la mise en état. Or l’examen des fins de non-recevoir édictées aux articles 564 et 910-4 du code de procédure civile, relatives pour la première à l’interdiction de soumettre des prétentions nouvelles en appel et pour la seconde à l’obligation de présenter dès les premières conclusions l’ensemble des prétentions sur le fond relatives aux conclusions, relève de l’appel et non de la procédure d’appel.

7. En second lieu, l’examen de ces fins de non-recevoir implique que les parties n’aient plus la possibilité de déposer de nouvelles conclusions après l’examen par le juge de ces fins de non-recevoir. Il importe, en effet, dans le souci d’une bonne administration de la justice, d’éviter que de nouvelles fins de non-recevoir soient invoquées au fur à mesure du dépôt de nouvelles conclusions et de permettre au juge d’apprécier si ces fins de non-recevoir n’ont pas été régularisées. Or, en matière de procédure ordinaire avec représentation obligatoire, conformément à l’article 783 du code de procédure civile, auquel renvoie l’article 907 du même code pour la procédure d’appel, les parties peuvent déposer des conclusions jusqu’à l’ordonnance de clôture, toutes conclusions déposées postérieurement étant irrecevables.

8. Dès lors, seule la cour d’appel est compétente pour connaître des fins de non-recevoir tirées des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile ».

Apeirogon

Devant le nombre inépuisable de scenarii, l’avocat qui s’interroge sur la compétence à statuer sur la recevabilité de la demande nouvelle en cause d’appel se trouve, au risque d’en perdre la face, confronté à la réalité d’un Rubik’s cube. Quelles sont les données du problème ? En terme statistique, par mesure empirique, on peut avancer qu’un conseiller de la mise en état sur deux s’estime compétent pour statuer sur les demandes nouvelles en cause d’appel. Au sein d’une même cour, selon que l’avocat frappe à telle ou telle porte d’un conseiller (en procédure civile l’avocat n’a jamais la clé de la chambre de son choix), la réponse est ou blanche ou...

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