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La fixation judiciaire du prix de vente, encore et toujours refusée

Dans un arrêt rendu le 4 juin 2025, la Cour de cassation maintient sa jurisprudence refusant toute fixation judiciaire du prix de vente. C’est aux parties de procéder à cette détermination, la loi laissant la possibilité à celles-ci de recourir aux services d’un tiers pour l’estimer.

La fixation du prix au sein d’un contrat à titre onéreux est aussi délicate qu’essentielle (v. sur l’état du droit positif, F. Terré, P. Simler, Y. Lequette et F. Chénedé, Droit civil – Les obligations, 13e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2022, p. 413 s., nos 370 s.). En septembre 2023, un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation avait précisé que l’article 1165 du code civil – prévoyant une possibilité de fixation unilatérale du prix au cas particulier de la prestation de service – n’était pas applicable aux honoraires d’un expert-comptable (Com. 20 sept. 2023, n° 21-25.386 FS-B, Dalloz actualité, 27 sept. 2023, obs. C. Hélaine ; D. 2023. 1783 , note T. Gérard ; ibid. 2024. 275, obs. R. Boffa et M. Mekki ; RTD civ. 2023. 862, obs. H. Barbier ; ibid. 919, obs. P.-Y. Gautier ). Le rendez-vous était alors manqué pour approfondir la question sur ce volet de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 réformant le droit des obligations (v. sur les problématiques suscitées par certains silences du texte, G. Chantepie et M. Latina, Le nouveau droit des obligations – Commentaire théorique et pratique dans l’ordre du code civil, 3e éd., Dalloz, 2024, p. 420, n° 420 ; G. Lardeux, Le contrat de prestation de service dans les nouvelles dispositions du code civil, D. 2016. 1659 ). À ce jour, les décisions publiées portant sur la détermination de la prestation monétaire sont encore rares s’agissant du droit applicable aux contrats conclus après le 1er octobre 2016.

Nous retrouvons aujourd’hui un arrêt du 4 juin 2025 qui s’éloigne de la théorie générale du contrat pour rejoindre le droit spécial de la vente. Il porte sur la question du rôle éventuel du juge quant à la fixation du prix. La décision ne manquera pas d’intéresser la pratique en ce qu’elle permet de rappeler le rôle essentiel des parties en la matière, la fixation judiciaire n’ayant toujours pas droit de cité.

Le dossier puise son origine dans une affaire complexe. Celle-ci débute par une promesse de cession d’un fonds de commerce de pharmacie conclue le 7 septembre 2015. Le contrat fixait un prix de cession « à 80 % du chiffre d’affaires annuel de référence, défini comme celui des douze derniers mois d’exploitation antérieurs à l’antépénultième mois précédant la cession » (pt n° 2). Divers éléments devaient être retranchés de ce prix dont, par exemple, les ventes de marchandises « hors-comptoir » ou encore la location du matériel médical. En cas de désaccord sur la détermination du prix définitif grâce à cette méthode de calcul, les parties avaient prévu de recourir aux services d’un tiers. Si aucun accord n’était trouvé sur l’identité de ce dernier, ou en cas de carence de celui-ci dans les six mois de sa désignation, l’article 10-2, alinéa 2, du contrat prévoyait que la partie la plus diligente devait saisir le président du Tribunal de commerce de Niort aux fins de désignation d’un expert. Nous soulignons cette précision à dessein en raison de son importance fondamentale pour la suite de l’analyse.

L’acte de cession définitif est signé le 31 mars 2016. Cependant, le prix n’a pas pu être fixé car les comptes de l’année 2015 n’avaient pas encore été arrêtés à ce moment-là. Un prix provisoire a donc été convenu. Au moment où ces comptes ont été connus, les parties n’ont pas trouvé, malheureusement, d’accord sur le prix définitif. Grâce à la stipulation précédemment examinée, elles désignent un tiers pour procéder à l’évaluation du chiffre d’affaires de la pharmacie. Celui-ci valorise ledit chiffre...

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