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Focus sur les conditions du maintien de l’activité d’une entreprise agricole en liquidation judiciaire

Quand bien même le maintien de l’activité d’une EARL en liquidation judiciaire peut être autorisé par le tribunal durant un certain délai eu égard aux usages spécifiques à l’activité agricole lorsque la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable ou si l’intérêt public ou celui des créanciers l’exige, il peut néanmoins y être mis fin à tout moment s’il n’est plus justifié. Or, selon la Cour de cassation, tel est le cas lorsque l’entreprise ne peut plus assumer financièrement les charges de la poursuite d’activité, et ce, indépendamment, a priori, de la spécificité de l’entreprise agricole.

L’avènement d’une procédure de liquidation judiciaire ne rime pas nécessairement avec l’arrêt immédiat de l’activité de l’entreprise débitrice ! Pour s’en convaincre, le premier alinéa de l’article L. 641-10 du code de commerce prévoit que si la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable ou si l’intérêt public ou celui des créanciers l’exige, le maintien de l’activité peut être autorisé par le tribunal pour une durée de trois mois, prorogeable une fois sur demande du ministère public (C. com., art. R. 641-18).

En somme, le même texte prévoit que lorsque l’entreprise débitrice est une exploitation agricole, ledit délai est fixé par le tribunal en fonction de l’année culturale en cours et des usages spécifiques aux productions concernées (sur la détermination de ces notions, R. Dalmau et C. Domenget, L’appréhension du temps agricole par le droit des entreprises en difficulté, RPC 2018/5, doss. 32).

Toujours est-il que malgré ces différents principes, le maintien de l’activité en liquidation judiciaire est précaire, car le tribunal peut notamment décider d’y mettre fin à tout moment si celui-ci n’est plus justifié (C. com., art. L. 641-10, al. 8).

Appliquant ces différentes règles, l’arrêt sous commentaire permet de répondre à une interrogation qui est à notre connaissance inédite : le prononcé de la fin du maintien de l’activité doit-il tenir compte de l’aménagement prévu pour les entreprises agricoles résidant dans la fixation du délai du maintien de l’activité en fonction de l’année culturale en cours et des usages spécifiques aux productions concernées ? Pour formuler les choses encore autrement, l’arrêt invite à s’interroger sur la question de savoir s’il existe un principe de maintien de l’activité jusqu’à la fin du cycle cultural, et ce, indépendamment, par exemple, de la question du financement de la poursuite de l’activité agricole.

Les faits de l’arrêt

En l’espèce, une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), qui portait sur une entreprise viticole, a été mise en redressement judiciaire et a bénéficié d’un plan arrêté en 2015 pour une durée de dix ans. Hélas, en raison de l’apparition d’un nouvel état de cessation des paiements, le tribunal, par un jugement du 19 juin 2020, a prononcé la résolution du plan et a ouvert une liquidation judiciaire avec un maintien de l’activité de l’EARL jusqu’au 19 septembre 2020. Or, avant l’arrivée de ce terme, par un jugement du 4 septembre 2020, le tribunal, saisi par une requête du liquidateur, a mis un terme immédiat au maintien de l’activité.

Le débiteur va interjeter appel de ce jugement, mais sans rencontrer le succès escompté, dans la mesure où les juges du second degré vont confirmer le premier jugement et rejeter la poursuite de l’activité.

Pour aboutir à cette conclusion, les juges d’appel ont d’abord constaté que l’EARL n’était plus en mesure de payer le...

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