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Formalisme et appel à jour fixe : n’en jetez plus !

En procédure à jour fixe, la cour d’appel est valablement saisie par la remise de la seule copie de l’assignation au greffe, sans qu’il soit nécessaire d’y joindre les copies de la requête aux fins d’autorisation d’assigner à jour fixe, de l’ordonnance présidentielle ainsi que de la déclaration d’appel. L’absence de remise de l’assignation est sanctionnée par la caducité de la déclaration d’appel et non par son irrecevabilité.

L’appel à jour fixe est complexe et rigoureux. C’est pourquoi on peut se réjouir de ce dernier-né jurisprudentiel qui refuse d’y ajouter une nouvelle dose de formalisme. Cet arrêt rendu en formation de section et promis à publication au Bulletin met un terme immédiat à ce qui pouvait apparaître comme une nouvelle dérive formaliste de certaines juridictions du fond.

L’affaire est des plus classiques. Des débiteurs relèvent appel d’un jugement d’orientation en matière de saisie immobilière. Pour reprendre une formule doctrinale inspirée, il s’agit alors d’un « jour fixe imposé », suivant l’article R. 322-19 du code des procédures civiles d’exécution (C. Laporte, La procédure à jour fixe dans tous ses états, Procédures 2014. Étude 8). Les débiteurs appelants requièrent donc du premier président l’autorisation d’assigner le créancier à jour fixe. L’autorisation obtenue, ils assignent l’intimé au jour fixé. Puis, ils remettent avant la date fixée pour l’audience la copie de la seule assignation au greffe de la cour d’appel. Sur quoi, un incident s’élève : la cour d’appel estime qu’il leur appartenait de remettre également la requête aux fins d’être autorisés d’assigner à jour fixe, l’ordonnance du premier président ainsi que la déclaration d’appel. Pour cette raison, elle déclare l’appel irrecevable.

L’appelant se pourvoit en cassation et va droit au but : selon lui, « la cour est valablement saisie par la remise par voie électronique au greffe de la seule assignation » (§ 3). La problématique en découlant est verbalisée par la Cour de cassation : « La question posée par le moyen est celle de savoir si l’article 922 du code de procédure civile, interprété à la lumière de l’article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, impose ou non, pour que la cour d’appel soit saisie, que soient jointes à la copie de l’assignation les copies de la requête, de l’ordonnance du premier président et un exemplaire de la déclaration d’appel » (§ 6).

La solution est nette : « L’article 922 du code de procédure civile n’impose pas que soient jointes à la copie de l’assignation remise au greffe, les pièces, destinées à l’information de l’intimé, mentionnées à l’article 920 du code de procédure civile » (§ 9). Pour aboutir à cette solution, la Cour de cassation assène un argument élémentaire : les pièces mentionnées par ledit article 920, en particulier la requête aux fins d’autorisation d’assigner à jour fixe et l’autorisation présidentielle consécutive, sont déjà versées au dossier de la cour (§ 7) ; de sorte qu’il n’est nul besoin de les exiger à nouveau en vue de sa saisine : « Toute autre interprétation constituerait une entrave disproportionnée à l’accès au juge en méconnaissance de l’article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales » (§ 10). La Cour de cassation prend encore soin de dissocier les textes et leur fonction, en rappelant que l’article 922 du code de procédure civile a « pour seul objet d’énoncer les formalités nécessaires à la saisine de la cour d’appel, celle-ci, devant être saisie par la remise d’une copie de l’assignation » (§ 8). Il est ainsi distancié de l’article 920 du même code, dont l’objet est autre.

Obiter dictum, la Cour de cassation ajoute que l’absence de remise au greffe de la seule assignation conformément audit article 922 est sanctionnée par la caducité de la déclaration d’appel, et non par l’irrecevabilité de l’appel (§ 12). Cassation avec renvoi est prononcée sur ces motifs.

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