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Fouille intégrale et retour de permission de sortir

Au retour d’une permission de sortir, le détenu qui n’a pas fait l’objet d’une surveillance constante de la part des policiers ou des gendarmes peut être soumis à une fouille intégrale sans qu’il soit nécessaire de justifier d’une présomption d’infraction ou d’un risque à la sécurité ou au bon maintien de l’ordre de l’établissement. 

La fouille est une mesure d’investigation physique pratiquée sur le corps d’une personne. Elle est intégrale lorsqu’elle consiste à mettre à nu un individu afin de pratiquer une investigation exhaustive, y compris, le cas échéant, en menant une investigation interne. L’administration pénitentiaire a longtemps pratiqué cette mesure afin d’identifier l’introduction d’objet prohibé (objet dangereux, stupéfiant…) au sein d’un établissement pénitentiaire, comme la circulaire du 14 mars 1986 diffusée par la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP) le lui permettait. Toutefois, pour le moins invasive, la fouille intégrale et sa pratique systématique et indiscriminée ont fait l’objet de multiples condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’homme (v. not., CEDH 12 juin 2007, Frérot c/ France, n° 70204/01, Dalloz actualité, 22 juin 2007, obs. A. Darsonville ; D. 2007. 2632 , obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé, M.-H. Gozzi et S. Mirabail ; ibid. 2008. 1015, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon ; AJ pénal 2007. 336, obs. M. Herzog-Evans ; RSC 2008. 140, obs. J.-P. Marguénaud et D. Roets ; ibid. 140, obs. J.-P. Marguénaud et D. Roets ; ibid. 404, chron. P. Poncela ; JCP 2007. I. 106, chron. F. Sudre) qui l’a assimilée, dans certains cas, à un traitement inhumain et/ou dégradant.

La jurisprudence du Conseil d’État (v. not., CE 30 janv. 2019, M. C…, n° 416999, Dalloz actualité, 14 févr. 2019, obs. C. Biget ; Lebon ; AJDA 2019. 257 ; AJ pénal 2019. 221, obs. C. Otero ), reprise en grande partie par le législateur (Loi n° 2009-1436 du 24 nov. 2009, Dalloz actualité, 26 nov. 2009, obs. S. Lavric ; Loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, Dalloz actualité, 14 juin 2016, obs. S. Fucini ; Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice), a donc permis de mettre en conformité la fouille intégrale avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

C’est sur l’existence d’un nouveau dispositif légal encadrant la fouille intégrale que le Conseil d’État a dû se prononcer dans l’arrêt du 18 avril 2025. En l’espèce, un individu a été condamné en 2013, 2016, 2019 et 2022, à diverses peines d’emprisonnement pour trafic de stupéfiants en état de récidive, recel, homicide involontaire, ainsi que pour des faits de violence sur officier public ou ministériel. Il a bénéficié de deux permissions de sortie au cours desquelles il n’a pas fait l’objet d’une surveillance continue par les forces de l’ordre. Au retour de la deuxième, il fait l’objet d’une fouille intégrale. Se prévalant d’un préjudice occasionné par cette fouille qu’il estime être injustifiée, il a demandé à l’administration d’être indemnisé. À défaut de réponse de celle-ci, il a saisi le Tribunal administratif d’Orléans qui a accueilli partiellement sa demande et condamné l’État à lui verser la somme de 100 € en reconnaissant, comme le relève le rapporteur public, « qu’aucun motif objectif tenant à des faits constatés en détention ou au comportement de M. B… au sein de l’établissement n’a justifié ces fouilles » (E. de Moustier, concl. du rapporteur public, n° 493732, Ministre d’État, garde des Sceaux, ministre de la Justice, Lebon ; AJDA 2025. 789 ). Le ministre de la Justice s’est pourvu en cassation en alléguant que les juges du fond ont commis une erreur de droit en retenant que cette fouille n’était pas justifiée de manière objective, alors même que le seul retour d’une personne détenue non surveillée permet de pratiquer une fouille intégrale.

En effet, le nouvel...

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