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Les fouilles intégrales systématiques au visa du handicap

La Défenseure des droits analyse la légalité des fouilles intégrales systématiques réalisées sur une personne détenue porteuse de prothèses aux genoux à l’origine du déclenchement des alarmes du portique de sécurité. 

La loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, appréhendée comme le texte fondateur du droit de l’exécution des peines, a constitué un tournant décisif en matière de droits et libertés des personnes détenues. L’évolution a trouvé son assise dans la reconnaissance du caractère impératif du respect de la dignité des personnes détenues et de leur justiciabilité. Du fait de la situation d’enfermement, la législation française met à la charge de l’administration pénitentiaire une mission de maintien de l’ordre et de la sécurité au sein des établissements pénitentiaires, laquelle se retranscrit notamment par la possibilité de réaliser des fouilles corporelles des personnes détenues. Ces fouilles sont l’objet de la décision de la Défenseure des droits commentée. Après avoir rappelé les critères de validité de celles-ci, elle appréhende les conséquences de l’illégalité des fouilles systématiques réalisées sur le requérant.

Conditions strictes de recours aux fouilles intégrales systématiques

Par sa décision du 19 avril 2024, la Défenseure des droits insiste sur les conditions de validité des fouilles intégrales systématiques, de forme et de fond.

Condition de forme : une décision motivée de placement sous le régime des fouilles systématiques

La Défenseure des droits soulève en premier lieu l’illégalité des fouilles réalisées sur le requérant du fait de l’absence de décision prise à l’issue de la commission pluridisciplinaire unique autorisant lesdites opérations.

Les décisions de soumettre une personne détenue à une fouille intégrale ponctuelle ou systématique est susceptible de recours devant les juridictions administratives (CE 14 nov. 2008, n° 315622, Dalloz actualité, 19 nov. 2008, obs. E. Royer ; Lebon ; AJDA 2008. 2145 ; ibid. 2389 , chron. E. Geffray et S.-J. Liéber ; D. 2008. 3013, obs. E. Royer ; ibid. 2009. 1376, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon ; AJ pénal 2009. 89, obs. É. Péchillon ; RFDA 2009. 957, obs. D. Pollet-Panoussis ; RSC 2009. 431, chron. P. Poncela ). En conséquence, cette décision doit être motivée afin qu’une vérification du respect des conditions soit opérée. La circulaire du 15 juillet 2020 relative aux fouilles de personnes détenues en application notamment de l’article 57 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 (NOR : JUSK2017670C) rappelle qu’« une décision écrite et motivée est toujours nécessaire », et qu’il appartient à l’administration pénitentiaire d’en assurer la traçabilité. D’ailleurs, il résulte de l’étude de la jurisprudence que l’absence d’énoncé des motifs justifiant la mesure peut entraîner sa nullité (CE 23 mars 2005, Stilinovic, n° 264005, Lebon ; AJDA 2005. 1022 ; Angers, 17 oct. 2023, n° 23/00923, Dalloz actualité, 21 nov. 2023, obs. B. David). Cette exigence est désormais retranscrite dans le code pénitentiaire en son article L. 225-2 seulement en ce qui concerne les fouilles justifiées par l’existence de raisons sérieuses de soupçonner l’introduction au sein de l’établissement pénitentiaire d’objets ou de substances interdits ou constituant une menace pour la sécurité des personnes ou des biens.

Au regard de la situation de vulnérabilité des personnes détenues (du fait notamment de leur dépendance vis-à-vis de l’administration pénitentiaire) et afin de garantir le respect de leur dignité, cette exigence est fondamentale.

Conditions de fond : une mesure subsidiaire, nécessaire, proportionnée et répondant aux nécessités de l’ordre public et aux contraintes du service public pénitentiaire

Le Conseil d’État s’était initialement démarqué et avait insisté dès 2013 sur le rejet du caractère systématique des fouilles intégrales (CE 6 juin 2013, n° 368816, Dalloz actualité, 17 juin 2013, obs. M. Léna ; Lebon ; AJDA 2013. 1191 ; AJ pénal 2013. 497, obs. E. Péchillon ). Le législateur s’est pourtant positionné différemment et a autorisé la réalisation de fouilles intégrales sous certaines conditions. Par une loi du 23 mars 2019 (Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, JO 24 mars), la législation française est venue inscrire expressément le caractère automatique des fouilles à l’article 57 de la loi pénitentiaire, opérant un véritable recul, réaffirmé dans le code pénitentiaire, lequel admet désormais la réalisation de fouilles systématiques lorsque les nécessités de l’ordre public et les contraintes du service public pénitentiaire l’imposent (C. pénit., art. L. 225-1).

En 2019, le Conseil d’État a affirmé que les fouilles intégrales doivent revêtir « un...

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