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Garde à vue d’un mineur : garantie du droit à l’assistance et au choix de l’avocat

Un mineur gardé à vue a le droit d’être assisté de manière effective par un avocat, droit dont ses représentants légaux doivent également être avisés afin de pouvoir choisir le conseil, y compris lorsque le mineur a déjà exprimé son choix d’être assisté d’un avocat commis d’office.

par Julie Galloisle 8 novembre 2019

En l’espèce, un mineur avait été identifié en présence de l’auteur d’un coup de feu, quelques minutes après les faits. Placé en garde à vue en juillet 2018, le mineur a été entendu à deux reprises puis déféré devant le juge d’instruction, lequel lui a octroyé le statut de mis en examen pour complicité de tentative d’assassinat en récidive avant de le placer en détention provisoire.

Le mineur a déposé, devant la chambre de l’instruction, une requête en annulation de la procédure, considérant que ses auditions en garde à vue avaient été effectuées en méconnaissance de ses droits à l’assistance et au choix d’un avocat. Par arrêt du 15 janvier 2019, la chambre de l’instruction a annulé la première audition mais a reconnu la régularité de la seconde.

Le mineur a formé un pourvoi en cassation faisant valoir que ses représentants légaux n’avaient pas été avisés du droit, pour le mineur, à être assisté d’un conseil. Il en déduisait une atteinte à ses droits de la défense, laquelle devait entraîner la nullité de l’ensemble des actes opérés au cours de sa garde à vue, et plus particulièrement celle du procès-verbal de la seconde audition. 

Il importe de relever qu’en l’espèce, à la différence de la première audition, le mineur avait été, au cours de cette seconde audition, assisté d’un avocat. Le mineur avait, en effet, sollicité la présence d’un avocat commis d’office auprès de l’officier de police judiciaire, lequel avait pris des mesures pour satisfaire sa demande et ainsi faire désigner un avocat commis d’office. Dans ces circonstances, la chambre de l’instruction avait constaté que le choix du mineur avait été respecté. Peu important dès lors que ses représentants légaux n’aient pas été avisés du droit, pour le mineur, à être assisté par le conseil de son choix, et ainsi n’aient pas eu la possibilité de le choisir.

Malgré le respect, par la chambre de l’instruction, du choix du mineur gardé à vue, la chambre criminelle casse, dans cette espèce, son arrêt aux motifs que le mineur « n’a[vait] pas été assisté par un avocat dès le début de sa garde à vue et que ses parents n’[avaie]nt pas été informés qu’ils pouvaient lui en désigner un ». Autrement tourné, la Cour de cassation sanctionne l’absence de possibilité, pour ses représentants légaux, de désigner l’avocat de leur choix, ce choix primant sur celui exprimé par le mineur gardé à vue d’être représenté par un avocat commis d’office. En effet, pour fonder sa décision, la Cour de cassation précise que « cette information vise à garantir l’assistance effective du mineur gardé à vue par un avocat, ainsi que le libre choix de l’avocat qui prodiguera cette assistance. Cette information est prévue dans l’intérêt du mineur placé en garde à vue et son absence entraîne la nullité du placement en garde à vue ».

Cette décision étonne néanmoins d’un point de vue de la lettre de l’article 4, IV, de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, issue de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, en ce qu’elle ne prévoit, conformément à ce qu’avait retenu la chambre de l’instruction, qu’une volonté subsidiaire des représentants légaux à celle exprimée par le mineur (« Lorsque le mineur n’a pas sollicité l’assistance d’un avocat, cette demande peut également être faite par ses représentants légaux qui sont alors avisés de ce droit lorsqu’ils sont informés de la garde à vue en application du II du présent article. Lorsque le mineur ou ses représentants légaux n’ont pas désigné d’avocat, le procureur de la République, le juge chargé de l’instruction ou l’officier de police judiciaire doit, dès le début de la garde à vue, informer par tout moyen et sans délai le bâtonnier afin qu’il en commette un d’office »), ce qui explique la large publication que la Cour de cassation a entendu donner à sa décision.

Relevons, pour conclure, que le mineur critiquait également, dans son pourvoi, le fait que la chambre de l’instruction n’était pas composée, comme l’exigent les dispositions de l’article L. 312-6 du code de l’organisation judiciaire, d’un délégué à la protection de l’enfance dès lors qu’un mineur est impliqué, seul ou avec des coauteurs complices majeurs. 

Si le respect de la régularité de cette règle d’ordre public (Crim. 7 févr. 2018, n° 17-85.353, Dalloz jurisprudence) est assurée par la Cour de cassation (Crim. 17 avr. 2019, n° 18-84.722, Dalloz jurisprudence), la critique était ici vaine, la conseillère déléguée à la protection de l’enfance ayant été régulièrement remplacée à l’audience de la chambre de l’instruction (déjà en ce sens, Crim. 17 avr. 2019, n° 18-84.722, préc.).