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Gel des avoirs libyens : interdiction des « mesures d’exécution »

Interdiction de pratiquer des procédures civiles d’exécution sur des fonds ou des ressources économiques gelés, à défaut d’autorisation préalable.

« Ne peut être diligentée, sur des fonds ou des ressources économiques gelés, aucune mesure d’exécution qui aurait pour effet, non seulement de les faire sortir du patrimoine du débiteur, mais aussi de conférer au créancier poursuivant un simple droit de préférence, sans une autorisation préalable du directeur du Trésor, autorité nationale désignée en application de l’article 11, § 2, du règlement n° 2016/44. » Telle est la solution consacrée par la première chambre civile de la Cour de cassation, en des termes identiques, dans deux arrêts prononcés le 7 septembre 2022.

Ce faisant, la première chambre civile transpose, dans le contexte du gel des avoirs libyens, une solution adoptée dans un arrêt du 29 avril 2022, par l’assemblée plénière, à l’égard du gel des avoirs iraniens (Cass., ass. plén., 29 avr. 2022, n° 18-18.542, D. 2020. 1473, et les obs. ; ibid. 2021. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki ; ibid. 1353, obs. A. Leborgne ; ibid. 1832, obs. L. d’Avout, S. Bollée et E. Farnoux ; RTD civ. 2020. 623, obs. H. Barbier ; ibid. 895, obs. P. Jourdain ). Pour rappel, dans ce dernier arrêt, la Cour de cassation faisait sienne l’interprétation suivie par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE 11 nov. 2021, Bank Sepah contre Overseas Financial Limited et a., aff. C-340/20), à qui elle avait préalablement soumis une demande de décision préjudicielle (Cass., ass. plén., 10 juill. 2020, nos 18-18.542 et 18-21.814, D. 2020. 1473 ; D. 2021. 310, obs. M. Mekki ; D. 2021. 1353, obs. A. Leborgne ; D. 2021, obs. E. Farnoux ; RLDC, févr. 2021, p. 33, note G. Payan).

On le sait, l’épineuse question du gel des avoirs appartenant à des États (adde A. d’Ornano, Sur le gel d’avoirs, Rev. crit. DIP 2022. 449 ) a conduit l’Union européenne à adopter différents règlements, dont le règlement (CE) n° 423/2007 du Conseil du 19 avril 2007 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran. Aux termes de ce règlement, la notion de « gel des fonds » est définie comme « toute action visant à empêcher tout mouvement, transfert, modification, utilisation ou manipulation de fonds qui aurait pour conséquence un changement de leur volume, de leur montant, de leur localisation, de leur propriété, de leur possession, de leur nature, de leur destination ou toute autre modification qui pourrait en permettre l’utilisation, notamment la gestion de portefeuilles ». Dans son arrêt Bank Sepah du 11 novembre 2021, la CJUE affirme que cette notion doit être largement interprétée et englober « toute utilisation de fonds ayant pour conséquence, notamment, un changement de la destination de ces fonds, même si une telle utilisation des fonds n’a pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur » (arrêt CJUE, pt 49). Par ailleurs, elle dit pour droit que les dispositions du règlement (CE) n° 423/2007 « s’opposent à ce que soient diligentées, sur des fonds ou des ressources économiques gelés dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, sans autorisation préalable de l’autorité nationale compétente, des mesures conservatoires qui instaurent, au profit du créancier concerné, un droit d’être payé par priorité par rapport aux autres créanciers,...

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