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Honoraires de résultat après un appel confirmatif : pas de double perception possible

La Cour de cassation précise pour la première fois que l’honoraire de résultat n’est pas dû de manière cumulative lorsque le résultat obtenu en appel est identique à celui obtenu en première instance.

par Cécile Caseau-Rochele 26 juillet 2021

Un honoraire de résultat dû au titre du résultat obtenu à l’issue de la première instance ne se cumule pas avec celui, identique, obtenu au titre de la procédure d’appel. Telle est la nouvelle solution dégagée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 8 juillet 2021.

En l’espèce, deux personnes assignées en paiement ont confié la défense de leurs intérêts à une avocate. Elles ont alors signé deux conventions d’honoraires successives, une pour la première instance et l’autre pour la procédure d’appel. Celles-ci prévoyaient, outre un honoraire de travail fixe, un honoraire de résultat, précision étant apportée qu’en cas d’appel, la somme due au titre de l’honoraire de résultat serait consignée sur le compte de l’avocate auprès de la CARPA jusqu’au prononcé de la décision définitive. L’avocate ayant effectué les prélèvements des sommes qu’elle estimait lui être dues, les clients ont saisi le bâtonnier d’une demande de taxation. Ce dernier n’ayant pas statué dans le délai légal de quatre mois, les clients ont saisi le premier président de la cour d’appel compétente qui a jugé que l’honoraire de résultat est dû de manière cumulative. Ils ont donc formé un pourvoi estimant qu’un arrêt confirmatif ne procure qu’un seul résultat, celui déjà obtenu devant les premiers juges, de sorte que l’avocat ne peut prétendre au versement que d’un seul honoraire de résultat, ceci même si une seconde convention d’honoraire a été conclue pour la procédure d’appel, identique à celle conclue pour la procédure de première instance, cette seconde convention ne pouvant avoir pour objet ou pour effet que de porter sur le résultat qui serait différent de celui obtenu en première instance. Au visa de l’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, la Cour de cassation a cassé l’ordonnance. Après avoir énoncé dans son chapeau que « l’honoraire de résultat prévu par convention préalable n’est dû par le client à son avocat que lorsqu’il a été mis fin à l’instance par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable », elle a censuré le premier président qui « a alloué un honoraire de résultat au titre d’une décision juridictionnelle non irrévocable ».

La Cour de cassation n’avait pas encore eu l’occasion de se prononcer sur la question de l’éventuel cumul de perception de l’honoraire de résultat lorsqu’un appel est interjeté. La solution retenue peut sembler relever de l’évidence mais elle méritait d’être précisée pour compléter l’édifice jurisprudentiel construit sur l’exigibilité des honoraires au gré des arrêts rendus (v. nos art. D. avocats 2018. 264  ; ibid. 2019. 183 ). Selon une jurisprudence constante, l’honoraire de résultat n’est dû par le client à son avocat que, lorsqu’il a été mis fin à l’instance par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable (Civ. 2e, 10 mars 2004, n° 01-16.910, D. 2004. 921, et les obs.  ; JCP 2004. II. 10114, note R. Martin). Autrement dit, seule la décision définitive génère l’honoraire de résultat. Admettre un double honoraire pour un même résultat aurait donc anéanti l’interprétation faite par la Cour de cassation de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971. Il reste à se demander si un résultat différent en appel serait de nature à générer deux honoraires. Dans cette hypothèse, on peut penser, comme le suggérait d’ailleurs le pourvoi, qu’il faudrait faire prévaloir la deuxième convention.

Ce faisant, la rédaction des clauses prévoyant l’honoraire de résultat était assez atypique et offre l’occasion de faire le point (v. J.-P. Depasse, Honoraire de résultat, aspects pratiques, D. avocats 2018. 272 et notre art., Rédiger une convention d’honoraires parce que les avocats le valent bien, D. avocats 2019. 153 ). S’agissant de son mode de calcul, il prend traditionnellement la forme d’un pourcentage des sommes obtenues à l’issue d’une décision favorable pour le client. Or, dans cette affaire, il était calculé sur la différence entre les sommes réclamées par le demandeur et celles allouées par la juridiction. La jurisprudence a admis la validité d’une telle clause car le succès peut en effet se concevoir comme un profit réalisé ou des sommes économisées (Civ. 2e, 5 oct. 2017, n° 16-23.050, Dalloz actualité, 25 oct. 2017, obs. T. de Ravel d’Esclapon ; D. 2017. 2037  ; D. avocats 2017. 408, obs. G. Royer  ; JCP 2018. 588 ; n° 4, nos obs.). Par ailleurs, le montant de 5 % HT était relativement faible comparativement au montant qui oscille en général entre 8 et 12 %. S’agissant enfin des modalités de perception, une consignation sur le compte de l’avocate auprès de la CARPA jusqu’au prononcé de la décision définitive était prévue, ce qui finalement revenait à admettre que l’honoraire n’est dû qu’une fois le résultat obtenu.

L’arrêt illustre ainsi une fois encore la nécessité de rédiger minutieusement la convention d’honoraires, en particulier en cas d’appel. Puisque cumuler deux honoraires pour un même résultat est impossible, ne serait-il pas opportun d’envisager de rehausser le taux afin de valoriser tout le travail effectué ?