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Imputation des libéralités au conjoint survivant sur ses droits légaux : la leçon de pédagogie de la première chambre civile

Les legs consentis au conjoint survivant doivent d’abord, non pas se cumuler, mais s’imputer en intégralité sur les droits légaux (C. civ., art. 757). Pour ce faire, il convient de calculer la valeur totale de ces legs, en ajoutant à la valeur des droits transmis en propriété, celle convertie en capital, des droits transmis en usufruit puis d’en comparer le montant total à la valeur du quart des biens calculé selon les modalités prévues à l’article 758-5 du code civil.

Aimer, avoir des enfants, se séparer, reconstruire sa vie après un échec, se remarier et avoir d’autres enfants… ce parcours de vie est celui de nombreuses personnes. Dans ce cas de figure, il n’est pas rare gratifier son nouveau conjoint pour le protéger et l’accompagner au-delà du trépas… parfois même au détriment de nos enfants issus d’unions précédentes. L’entrée du conjoint dans la succession n’est pas toujours sans heurts comme en attestent de nombreuses affaires.

Dans cette affaire, un homme décède le 6 juin 2010 en laissant sa veuve (Mme M.), leurs deux enfants communs (MM. J. et T.) et son fils ainé issu d’une union précédente (M. X.). En janvier 2010, le défunt avait pris soin de rédiger un testament olographe par lequel il léguait à son épouse les liquidités et les valeurs en toute propriété ainsi que l’usufruit de tous les biens meubles et immeubles qui constituaient sa succession. Par ce testament, il avait également attribué la nue-propriété de ses biens immobiliers entre ses trois enfants. Le 1er décembre 2010, le notaire établit un acte liquidatif que les héritiers, dont celui issu du premier lit, signent. En octobre 2014, le fils issu du premier mariage estimant avoir été lésé lors de la liquidation, assigne le notaire et la société notariale afin d’engager leur responsabilité. Le tribunal de grande instance (Bobigny, 29 sept. 2017, n° 18/02426) le déboute de ses demandes considérant que l’action en responsabilité était mal fondée. Saisie de l’affaire, la cour d’appel (Paris, 2 juin 2021, n° 18/02426) retient que le notaire a effectivement manqué à son obligation d’information et de conseil à l’égard du demandeur mais estime que ce dernier ne justifie pas d’une perte de chance de négocier un partage plus avantageux. En effet, elle a retenu que les droits successoraux de la veuve se cumulent avec les libéralités que le de cujus lui a consenties selon les dispositions de l’article 758-6 du code civil et que, par application combinée des articles 757 et 1094-1 du même code, celle-ci bénéficie, outre du quart en pleine propriété de la succession, de l’usufruit des trois quarts, au titre de la quotité disponible spéciale au profit du conjoint survivant. Ce faisant, les juges du fond considèrent que les droits du fils ainé dans la succession de son père étaient de la nue-propriété du quart et qu’ayant reçu du partage des droits d’une valeur supérieure, celui-ci ne justifie d’aucune perte de chance de refuser...

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