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Indivisibilité des faits et enregistrement de l’interrogatoire en matière criminelle

La Cour de cassation apporte d’utiles précisions sur le champ d’application des articles 80 et 116-1, aliné 1er, du code de procédure pénale.

par Margaux Dominatile 24 novembre 2020

Dans le cadre d’une information judiciaire des chefs de recels en bande organisée, association de malfaiteurs et blanchiment en bande organisée, ouverte le 11 juillet 2014, une personne prévenue est soupçonnée d’avoir fait échapper d’importantes sommes d’argent au fisc marocain en remettant des espèces à des intermédiaires finançant des trafics et alimentant, en contrepartie, le compte bancaire ouvert à son nom dans une banque suisse. Un réquisitoire supplétif est intervenu le 16 octobre 2015, étendant la période prévention jusqu’en octobre 2015. Le 25 novembre 2016, la prévenue est mise en examen des chefs de blanchiment aggravé et association de malfaiteurs en raison de faits commis jusqu’au 13 octobre 2015, puis fait l’objet d’une mise en examen supplétive le 16 août 2018 pour des faits commis jusqu’en novembre 2016. Elle formule une requête en nullité devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, à laquelle celle-ci a fait partiellement droit le 31 janvier 2020, en annulant la mise en examen supplétive de l’intéressée, mais uniquement du chef d’association de malfaiteurs pour les faits commis jusqu’en novembre 2016. La prévenue forme alors un pourvoi en cassation contre cette décision.

Pour suivre l’ordre de l’arrêt, il faudra étudier successivement les deux moyens soulevés par la prévenue, auteur du pourvoi, dont découlent deux problématiques distinctes.

En premier lieu, l’intéressée reprochait à la cour d’appel d’avoir excédé l’étendue de sa saisine en rejetant ses demandes d’annulation de la mise en examen supplétive ainsi que ses demandes d’entraide judiciaire suisse et de leurs pièces d’exécution. Selon elle, les réquisitoires introductifs et supplétifs visaient uniquement des faits commis sur le territoire national, ceux commis à l’étranger devaient être analysés comme des faits nouveaux. En d’autres termes, la prévenue alléguait une violation de l’article 80 du code de procédure pénale par la chambre de l’instruction en ce qu’aucun réquisitoire supplétif n’avait été présenté s’agissant des faits commis à l’étranger, qui ne pouvaient donc être valablement instruits. Au contraire, pour se dégager de cette exigence, la chambre de l’instruction énonçait que l’indivisibilité des faits permettait au « juge d’instruction [d’informer] sur l’ensemble, y compris sur les actes mis en évidence à l’étranger, alors même que l’acte de poursuite […] ne viserait que ceux commis sur le territoire national » (§ 8 du présent arrêt).

Pour trancher ce point de droit, la Cour de cassation s’appuie sur sa propre définition de l’indivisibilité. Il s’agit du rattachement des faits entre eux par « un lien tel que l’existence des uns ne se comprendrait pas sans l’existence des autres » (pour un ex. récent, Crim. 31 mai 2016, n° 15-85.920, Dalloz actualité, 21 juin 2016, obs. D. Goetz ; D. 2016. 1989 , note D. Rebut ; ibid. 1597, chron....

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