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Le juge des référés ne peut obliger l’administration à tenir le requérant informé de l’exécution d’injonctions déjà ordonnées

Un justiciable qui estime que des injonctions prononcées par le juge du référé-liberté n’ont pas été respectées par l’administration peut le saisir à nouveau afin qu’il ordonne toute mesure utile de nature à en assurer l’exécution. Mais la charge de la preuve de l’inexécution repose sur le requérant.

Saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative (CJA) par la Section française de l’Observatoire international des prisons et l’ordre des avocats du Barreau de Toulouse, le juge des référés tribunal administratif de Toulouse a, le 4 octobre 2021, constaté que les conditions de détention au sein du centre pénitentiaire de Toulouse-Seysses portaient une atteinte grave aux libertés fondamentales des détenus. Le tribunal administratif a donc prononcé une série d’injonctions à l’encontre du ministère de la Justice. Il lui a enjoint, notamment, de mettre en place un abri et des bancs dans la cour de promenade de la prison, de nettoyer et rénover les installations sanitaires, de cloisonner certaines douches, d’assurer la séparation de l’espace sanitaire du reste de l’espace, de rétablir le rythme antérieur de deux promenades quotidiennes pour les détenus placés en cellules triplées, ou encore de prendre des mesures pour renforcer l’efficacité de la lutte contre les rats, les blattes et autres nuisibles.

Estimant, à la suite d’une visite de la prison par le bâtonnier de l’ordre des avocats du Barreau de Toulouse, que cette ordonnance n’avait pas été entièrement exécutée par le garde des Sceaux, l’Observatoire a saisi à nouveau le tribunal, sur le fondement de l’article L. 521-4 du CJA, qui dispose que : « Saisi par toute personne intéressée, le juge des référés peut, à tout moment, au vu d’un élément nouveau, modifier les mesures qu’il avait ordonnées ou y mettre fin ». Découlant du caractère nécessairement provisoire des injonctions prononcées en référé, ces dispositions permettent au juge des référés de modifier les mesures prononcées dans le cadre de la première ordonnance, mais également de les compléter d’une mesure d’injonction ou d’astreinte, lorsqu’il apparait que les injonctions sont restées sans effet et que le requérant en recherche l’exécution (CE 27 juill. 2015, n° 389007, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, Dalloz actualité, 4 sept. 2015, obs. J.-M. Pastor ; Lebon ; AJDA 2015. 1515 ). Le Conseil d’État a d’ailleurs admis que l’article L. 521-4 peut être utilement mobilisé pour obtenir l’exécution d’une ordonnance du juge des référés, parallèlement à la procédure traditionnelle d’exécution régie par les articles L. 911-4 et L. 911-5 du CJA (CE 28 juill. 2017, n° 410677, Section française de l’Observatoire international des prisons, Dalloz actualité, 31 juill. 2017, obs. M. B ; Lebon avec les concl. ; AJDA 2017. 1589 ; ibid. 2540 , note O. Le Bot ; D. 2018. 1175, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon ; AJ pénal 2017. 456, obs. J.-P. Céré ).

Une invitation à étendre l’office du juge des référés

Aussi par une nouvelle ordonnance rendue le 2 août 2022, le tribunal administratif a considéré que certaines injonctions ont été correctement exécutées par le garde des Sceaux. La section française de l’OIP n’étant pas de cet avis, elle interjette appel de l’ordonnance devant le Conseil d’État. Au soutien de cet appel, l’Observatoire faisait valoir que le juge des référés, saisi sur le fondement de l’article L. 521-4 et chargé de vérifier la bonne exécution des injonctions prononcées en référé, devrait pouvoir organiser le suivi des injonctions prononcées contre l’administration, notamment celles qui sont restées sans effet.

Jusqu’ici, le Conseil d’État, saisi à de nombreuses reprises par l’OIP, refusait d’inclure dans l’office du juge des...

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