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Le juge pénal face à l’action civile en matière de terrorisme

Selon l’article 706-16-1 du code de procédure pénale, la cour d’assises spécialement composée doit, après avoir déclaré recevables les demandes de réparation présentées par les parties civiles, renvoyer l’affaire devant le tribunal judiciaire de Paris conformément à l’article L. 217-6 du code de l’organisation judiciaire. Méconnaît ces dispositions la cour d’assises qui les déclare en outre fondées en leur principe.

Si la notion de partie civile en matière de terrorisme était au cœur des arrêts du 15 février 2022 (Crim. 15 févr. 2022, nos 21-80.264, 21-80.265, 21-80.670 et 19-82.651 P, Dalloz actualité,18 févr. 2022, obs. D. Goetz ; D. 2022. 1487, obs. J.-B. Perrier ; ibid. 1934, obs. M. Bacache, A. Guégan et S. Porchy-Simon ; AJ pénal 2022. 143, note J. Alix ; RSC 2022. 332, obs. Y. Mayaud ; ibid. 636, obs. P.-J. Delage ), et encore récemment du 24 janvier 2023 (Crim. 24 janv. 2023, nos 21-82.778 et 21-85.828, Dalloz actualité, 21 févr. 2023, obs. D. Floreancig), l’arrêt soumis à commentaire permet quant à lui d’apporter des précisions sur l’office des juridictions répressives saisies par ces victimes d’une demande en réparation.

En l’espèce, par un arrêt criminel, du 13 juin 2022, la cour d’assises de Paris, spécialement composée et statuant en appel, condamnait deux accusés respectivement à trente ans de réclusion criminelle et dix ans d’emprisonnement pour association de malfaiteurs terroristes en récidive légale. Ce même jour, la cour se prononçait sur les intérêts civils déclarant les constitutions de parties civiles de deux associations de victimes d’attentats recevables et fondées en leur principe. Par cet arrêt civil, et conformément à l’article 706-16-1 du code de procédure pénale, la cour d’assises renvoyait l’examen de ces demandes en réparation devant la Juridiction spécialisée pour l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme (JIVAT) du tribunal judiciaire de Paris. L’un des moyens du pourvoi formé par les deux accusés portait précisément sur la mention par laquelle la cour d’assises déclarait les actions civiles « fondées en leur principe ». Ce moyen était pris de la violation des articles L. 217-6 du code de l’organisation judiciaire et 706-16-1 du code de procédure pénale qui, depuis la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, octroient une compétence exclusive au juge civil pour statuer sur le contentieux de l’indemnisation des victimes d’actes terroristes. Il était donc soutenu que la cour ne pouvait déclarer ces demandes de réparation comme étant fondées, cette action ne pouvant être exercée que devant la juridiction civile et séparément de l’action publique. En somme, au prisme de cette mention, la chambre criminelle était appelée à préciser l’application des règles spécifiques à l’action civile en matière de terrorisme.

La recevabilité de la constitution de partie civile et rien que sa recevabilité

La chambre criminelle censure l’arrêt de la cour d’assises, mais seulement en son arrêt civil, considérant que les juges, en déclarant les constitutions de partie civile « fondées en leur principe » ont outrepassé le champ de leur saisine. Au visa de l’article 706-16-1, il est jugé qu’il « appartenait seulement [à la cour d’assises], au constat que des demandes de réparation étaient présentées par les parties civiles, de les déclarer recevables et de renvoyer l’affaire devant le tribunal judiciaire de Paris » [nous soulignons].

Ce transfert en faveur des juridictions civiles a pour conséquence de déposséder le juge pénal d’une de ses compétences. L’on sait que l’action civile revêt un double visage devant les juridictions répressives. D’une part, elle est...

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