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L’action en liquidation d’une astreinte se prescrit par cinq ans

L’action en liquidation d’une astreinte est soumise à une prescription quinquennale de droit commun applicable aux actions personnelles et mobilières prévue par l’article 2224 du code civil et ne relève pas du délai de prescription décennal prévu, pour l’exécution des titres exécutoires, par l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution. Bien qu’une astreinte assortisse l’exécution du titre exécutoire qui la prononce, l’action en liquidation de celle-ci se prescrit par cinq ans.

par Elisabeth Botrelle 10 avril 2019

On sait que l’astreinte est une technique destinée à faire pression sur un débiteur pour l’inciter à exécuter la décision de justice portant condamnation à l’exécution de différentes obligations. Elle prend la forme d’une condamnation financière dont le montant s’accroît au fur et à mesure de la non-exécution ou du retard pris dans l’exécution mais son prononcé ne fait naître de droit, pour le créancier, à l’encontre du débiteur qu’à partir du moment où elle est liquidée (en somme, chiffrée) ce qui impose, par conséquent, l’introduction d’une action en liquidation. Alors que la question de savoir à quel délai de prescription est soumise une telle action en liquidation d’une astreinte revêt une importance en pratique, il semble qu’elle n’ait pas reçu, jusqu’à présent, de réponse explicite de la part de la Cour de cassation. Cet arrêt de rejet rendu le 21 mars 2019 et publié au bulletin vient donc apporter cette précision en indiquant que cette action est soumise au délai de prescription des actions personnelles et mobilières de cinq ans (C. civ., art. 2224). Il ne s’agit donc pas de faire application du délai de prescription prévu pour l’exécution des titres exécutoires judiciaires par l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution qui est de dix ans. La solution implique donc, pour le créancier, de ne pas rester passif trop longtemps et de renouveler, lorsqu’une période est écoulée, une nouvelle demande en liquidation de l’astreinte pour ne pas perdre le bénéfice de celle qui a été prononcée.

En l’espèce, un jugement d’un tribunal de commerce avait ordonné en 1996 à une société exploitant un hypermarché dans un centre commercial, et cela sous astreinte d’une certaine somme par jour de retard, de fermer certaines entrées ouvertes dans ce centre pour que le flux de clientèle se rendant à l’hypermarché passe par la nouvelle galerie marchande. Mais ce n’est qu’en 2013 que quatre sociétés décident de saisir le tribunal de commerce en liquidation de l’astreinte. Les juges en première instance ainsi qu’en appel n’ont pourtant pas fait droit à cette demande de liquidation d’astreinte en déclarant lesdites sociétés irrecevables par l’effet de la prescription. Les juges d’appel avaient ainsi retenu la prescription quinquennale de droit commun de l’article 2224 du code civil pour débouter ces sociétés. Les juges du fond avaient également écarté la fraude, qui avait été soulevée, à l’encontre de la société exploitant l’hypermarché en retenant que la preuve n’avait pas été rapportée que l’ouverture d’une porte supplémentaire dans la galerie marchande avait été précédée ou accompagnée de manœuvres de la part de la société intimée.

Les sociétés déboutées de leurs demandes de liquidation d’astreinte, aussi bien en première instance qu’en appel, décident dès lors de former un pourvoi en cassation en soulevant tout d’abord que « la demande en liquidation d’une astreinte se prescrit par dix ans à compter de la signification du titre exécutoire qui la prononce ». Pour le pourvoi, en raison de l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription, la prescription de dix ans relative à l’exécution des titres exécutoires était applicable. Ainsi, puisque cette loi était entrée en vigueur le 19 juin 2008, le délai courait jusqu’au 19 juin 2018. Dès lors, au regard de l’espèce, l’addition de l’ancien délai de prescription déjà écoulé jusqu’au 19...

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