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L’affaire Benalla enflamme le Parlement

L’affaire Benalla, du nom de ce collaborateur du président de la République vu sur une vidéo en train de frapper un manifestant a occupé les débats au Sénat et à l’Assemblée. Si au Sénat, le gouvernement a fourni de maigres éléments d’explication, à l’Assemblée l’affaire a totalement éclipsé le projet de loi constitutionnelle et abouti à une commission d’enquête parlementaire.

par Pierre Januelle 20 juillet 2018

Au Sénat, Édouard Philippe a indiqué que Benalla avait été autorisé à assister aux opérations de maintien de l’ordre « en tant qu’observateur, pas en mission ». Pour le Premier ministre, « il est clair qu’il a outrepassé son rôle d’observateur ». Il a rappelé sa mise à pied sans traitement dès le 4 mai et l’ouverture d’une enquête préliminaire par le procureur de Paris. Gérard Collomb a précisé que le rapport de l’IGPN sera rendu public. Il devrait être remis en fin de semaine de prochaine.

À l’Assemblée les débats ont été particulièrement houleux. À l’occasion de trente-sept rappels au règlement, les députés LR, PCF, FI, UDI et socialistes, ont demandé des explications. Le gouvernement et la majorité sont souvent restés silencieux face aux demandes de plus en plus pressantes d’auditionner le ministre de l’Intérieur ou de créer une commission d’enquête parlementaire. Ils ont au final été contraints d’agir sous la pression.

Après une longue suspension de séance, la majorité a accédé à la demande de commission d’enquête. Mais la création d’une commission d’enquête ad hoc, alors que le Parlement siège en session extraordinaire, aurait nécessité la modification du décret présidentiel de convocation du Parlement. La majorité a donc préféré donner les pouvoirs d’enquêtes à la commission des lois pour travailler, pendant un mois, sur les « événements survenus en marge de la manifestation parisienne du 1er mai 2018 ».

Cette extension des pouvoirs de la commission sera accordée si le Président de l’Assemblée n’est saisi d’aucune opposition par le gouvernement ou président d’un groupe. Déjà utilisée par le parlement pour contrôler l’état d’urgence ou par la commission des lois du Sénat sur les moyens de la justice (V. Dalloz actualité, 6 avr. 2017, obs. C. Fleuriot isset(node/184332) ? node/184332 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>184332), cette procédure se rapproche de la commission d’enquête. Les personnes auditionnées y témoignent sous serment et elles disposent de pouvoirs de contrainte.

Son objet sera notifié au ministre de la Justice. L’impossibilité d’enquêter sur des faits faisant l’objet de poursuites judiciaires pourrait être un frein, mais la présidente de la commission, Yaël Braun-Pivet a affirmé que cela ne devrait pas être un problème. L’autre obstacle pourrait être l’impossibilité de mettre en cause le chef de l’État, des collaborateurs de l’Élysée pouvant s’y réfugier pour refuser d’être auditionnés.

Ces travaux se feront toutefois dans le cadre de la commission des lois. Les 73 commissaires aux lois en seront tous membres et la présidente restera Yaël Braun-Pivet, qui sera par ailleurs corapporteure de la mission (l’autre corapporteur sera le député LR Guillaume Larrivé). Sauf décision contraire de la commission, les auditions, qui se tiendront dès le début de la semaine prochaine, ne seront pas publiques.

Les commissaires auront un mois pour travailler, alors que le calendrier de la commission des lois est déjà très encombré : le projet de loi asile-immigration arrive la semaine prochaine en séance, et par les débats sur le projet de loi constitutionnelle (dont Braun-Pivet est corapporteure) n’en finissent pas. En deux semaines, seuls deux des dix-huit articles ont été étudiés et nul n’est capable de dire quand les débats pourraient se finir.