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L’associé face à l’ouverture de la procédure collective de sa société : quel(s) recours ?

Le jugement d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire d’une société ne peut pas faire l’objet d’un appel et d’un pourvoi en cassation de la part d’un associé de cette société. À cet égard, il importe peu qu’il soit intervenu volontairement en première instance pour contester la déclaration d’état de cessation des paiements effectuée par la personne morale. Cette intervention, même principale, n’a pas pour effet de lui ouvrir une voie de recours que la loi lui a fermée.

Entre des délais d’action réduits et une qualité pour agir triée sur le volet, l’exercice des voies de recours dans le contexte particulier du droit des entreprises en difficulté est un art subtil (v. par ex., Com. 14 sept. 2022, n° 21-11.937 P, Dalloz actualité, 26 sept. 2022, obs. P. Cagnoli ; D. 2022. 1596 ).

La situation de l’associé face au jugement d’ouverture de la procédure collective de sa société en témoigne et c’est ce qu’illustre l’arrêt ici rapporté.

En l’espèce, une SCI a sollicité l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Or, l’un de ses associés est intervenu volontairement à l’instance devant le tribunal et a contesté l’état de cessation des paiements de la personne morale. Las, la société ayant été mise en liquidation judiciaire, l’associé a fait appel du jugement d’ouverture.

Les juges du second degré estimeront ce recours irrecevable et l’associé se pourvoit en cassation.

Sans surprise, la Haute juridiction déclare, à son tour, le pourvoi irrecevable au visa de l’article L. 661-1, I, 2°, du code de commerce.

Plus précisément, la Haute juridiction estime que le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire d’une société n’étant pas susceptible d’un appel et d’un pourvoi en cassation de la part d’un associé de cette société, le pourvoi de ce dernier, qui n’invoque aucun excès de pouvoir qu’aurait commis ou consacré la cour d’appel, n’est pas recevable, et ce, peu important qu’il soit intervenu volontairement en première instance pour contester l’état de cessation des paiements déclaré par la débitrice.

Plus précisément, là où l’arrêt est intéressant, c’est qu’il affirme que l’intervention, fût-elle qualifiée de principale, n’a pas pour effet d’ouvrir à l’associé une voie de recours, qui, en tout état de cause, lui est fermée par la loi.

Au demeurant, hormis cette spécificité procédurale, en refusant la voie de l’appel et du pourvoi en cassation à l’associé sur le jugement d’ouverture de la procédure collective de sa société, l’arrêt sous commentaire opère le rappel d’une règle bien établie. Cela étant, c’est ici l’occasion d’identifier les voies de recours qui sont, au contraire, ouvertes à l’associé.

Les voies de recours fermées à l’associé : l’appel et le pourvoi en cassation

L’article L. 661-1 du code de commerce n’ouvre l’appel et le pourvoi en cassation contre le jugement d’ouverture d’une procédure collective qu’aux seules personnes qui y sont visées : le débiteur, le créancier poursuivant, le comité social et économique ou les membres de sa délégation du personnel et le ministère public.

Ainsi la Cour de cassation a-t-elle déjà eu l’occasion de préciser qu’un associé, n’ayant pas la qualité de partie au jugement prononçant la liquidation judiciaire, n’est pas recevable à interjeter appel du jugement d’ouverture de la procédure (Com. 13 juin 2006, n° 05-12.748 NP).

Ce dernier arrêt est extrêmement intéressant pour l’analyse, mais il pourrait quelque peu en brouiller les pistes en ce qu’il semble conditionner l’ouverture de l’appel et du pourvoi en cassation à la qualité de partie au jugement d’ouverture de la procédure collective.

À ce propos, l’on peut s’interroger sur l’incidence, en l’espèce, de l’intervention volontaire de l’associé à l’instance. Plus précisément, la question se pose de savoir si l’intervention volontaire de l’associé n’a pas eu pour effet d’ériger ce dernier au rang de « partie » à l’instance lui ouvrant donc, théoriquement, la voie de l’appel et du pourvoi.

Dans la pureté des notions, l’article 63 du code de procédure civile qualifie l’intervention de « demande incidente » et cette dernière est définie par l’article 66 du même code comme la demande dont l’objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires.

En outre, cette intervention volontaire peut être qualifiée de principale (C. pr. civ., art. 329) ou bien d’accessoire (C. pr. civ., art. 330).

Selon le premier de ces textes, l’intervention est principale lorsqu’elle élève une prétention au profit de celui qui la forme et qu’elle n’est recevable que si son auteur a le droit d’agir relativement à cette prétention. Selon le second texte, l’intervention est accessoire lorsqu’elle appuie les prétentions d’une partie et elle n’est recevable que si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie (pour un exemple d’enjeu lié à cette qualification, Civ. 2e, 14 janv....

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