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L’avenir de l’Institut des hautes études sur la justice en suspens
L’avenir de l’Institut des hautes études sur la justice en suspens
Les institutions de recherche et de réflexion sur la justice sont en chambardement. Après la suppression de plusieurs organismes l’an dernier, c’est l’avenir de l’Institut des hautes études sur la justice (IHEJ) qui pose question. Son ancien secrétaire général, Antoine Garapon, a quitté son poste en septembre. Une mission a été lancée pour proposer des pistes.
par Pierre Januelle 28 octobre 2020
![](https://www.dalloz-actualite.fr/sites/dalloz-actualite.fr/files/imagecache/page_node_illustration/images/2020/10/fl-falaise-mer-ocean-montagne-nf.jpg)
En juin 2019, une circulaire d’Édouard Philippe avait entraîné d’importants remous dans les organismes de recherche et de réflexion sur la justice. La volonté de supprimer un grand nombre de comités avait abouti à la suppression de plusieurs d’entre eux (v. Dalloz actualité, 16 oct. 2019, art. P. Januel). Côté ministère de l’Intérieur, c’est l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) qui a été démembré. Un temps, la Mission de recherche droit et justice (MRDJ), cofinancée par le CNRS et le ministère de la Justice, avait été menacée, avant d’être finalement confortée.
Cette année, c’est l’Institut des hautes études sur la justice qui est concerné. Cet institut est chargé « de développer les échanges entre les professionnels du droit et les universitaires afin de promouvoir la réflexion et la recherche sur les normes, la régulation juridique, les missions et le fonctionnement de la justice et de contribuer au développement des valeurs de justice ». Depuis trente ans, il a produit de nombreuses études et réflexions sur la justice et le droit. Sous statut associatif, la gouvernance de l’IHEJ est originale, puisqu’il est présidé à tour de rôle par le premier président de la Cour de cassation, le président du Conseil constitutionnel, le vice-président du Conseil d’État et le premier président de la Cour des comptes. Un moyen de garantir son indépendance.
Toutefois, ses moyens sont limités : subventionné par les ministères de la Justice et des Affaires étrangères, son budget n’est que de 300 000 € et il est dans une situation financière fragile, notamment depuis la suppression de la réserve parlementaire. Fin 2019 s’était posée la question d’un rapprochement avec la MRDJ. Une solution vivement contestée lors du conseil d’administration de décembre 2019. Plusieurs voix, dont celle de Robert Badinter, avaient insisté sur la nécessité de préserver l’indépendance de l’IHEJ et rejeté une « fusion-absorption », l’IHEJ étant nettement plus petit que la MRDJ.
Une mission sur l’avenir de l’IHEJ
La question est revenue un an plus tard, lors du conseil d’administration de l’IHEJ de septembre dernier. Entre-temps, s’il n’y a plus de pression ministérielle pour supprimer des organismes, plusieurs acteurs avaient changé d’avis. Lors de ce conseil, le magistrat Antoine Garapon, secrétaire général de l’Institut depuis 2004, a été poussé vers la sortie. Le travail d’Antoine Garapon, qui a porté les travaux de l’institut, a été salué. Mais, derrière son départ, il y a des désaccords stratégiques sur l’avenir de l’Institut et ses orientations.
Pour l’avenir de l’IHEJ, une mission a été confiée à la magistrate Sonya Djemi-Wagner, inspectrice à l’IGJ et ancienne conseillère justice d’Emmanuel Macron. Dans sa lettre de mission, cosignée par Éric Dupond-Moretti et Laurent Fabius, l’hypothèse d’un rapprochement avec la MRDJ est évoquée. Une hypothèse qui aurait un sens, si elle permet aux deux organismes de se renforcer. Mais, outre des objets différents (l’IHEJ est axée sur la prospective et la réflexion), il faudrait aussi concilier des gouvernances radicalement différentes. Des rapprochements peuvent aussi être envisagés avec d’autres institutions, comme l’École nationale de la magistrature. Sonya Djemi-Wagner devrait rendre ses conclusions d’ici début décembre.
L’incertitude actuelle inquiète les acteurs du monde de la recherche sur la justice et les personnels de l’IHEJ, qui craignent de faire les frais d’un mécano politique. Mais cette crise met surtout en lumière les faiblesses des organismes de recherche et de réflexion sur la justice et le droit. Quand les ministères des Affaires étrangères et de la Défense accordent beaucoup plus de moyens à la recherche et la prospective, les organismes dépendant du ministère de la Justice souffrent de sous-financements chroniques, que ceux-ci soient publics ou privés.
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