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L’expulsion d’un terroriste vers le Maroc ne viole pas l’article 3 de la Convention

La Cour européenne des droits de l’homme a admis que l’expulsion vers le Maroc d’un ressortissant marocain condamné en France pour terrorisme ne viole pas l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. En revanche, en expulsant le jour même de la notification de la décision à la personne, la France viole l’article 34 de la Convention.

par Emmanuelle Maupinle 3 mai 2018

Arrivé en France en 1991, M. A. S. a acquis la nationalité française en 2002. En 2013, il a été condamné à sept ans de prison pour avoir participé à la préparation d’actes terroristes. En 2014, il a été déchu de sa nationalité. Sa demande d’asile a été rejetée le 25 août 2015. Le 22 septembre, jour de sa libération, l’arrêté d’expulsion, pris le 14 août, lui a été notifié. À 12h05, la Cour indiqua au gouvernement français de ne pas procéder au renvoi du requérant avant le 25 septembre. À 12h35, M. A. S. a été renvoyé au Maroc.

Devant la Cour, il soutenait que la mise à exécution de son renvoi l’exposait à un risque de mauvais traitements. Pour rejeter le moyen, la Cour relève, contrairement à ce qu’elle avait jugé à propos d’une expulsion vers l’Algérie (CEDH 1er févr. 2018, n° 9373/15, AJDA 2018. 250 ), que « le Maroc a pris des mesures afin de prévenir les risques de torture et de traitements inhumains et dégradants ». De plus, « la nature de la condamnation du requérant ainsi que les contextes national et international, profondément et durablement marqués par la lutte contre le terrorisme, expliquent que celui-ci puisse faire l’objet de mesures de contrôle et de surveillance à son retour au Maroc, sans que celles-ci puissent, ipso facto, être constitutives d’un traitement prohibé par l’article 3 de la convention ». Elle estime, en outre, que le requérant n’a apporté aucune preuve établissant que ses complices poursuivis au Maroc aient subi des traitements prohibés par l’article 3 (V. sol. contr., CEDH 26 janv. 2017, n° 16744/14).

S’agissant de l’article 34, la Cour européenne des droits de l’homme reconnaît qu’il peut être nécessaire de mettre en œuvre une mesure d’expulsion avec célérité et efficacité. Mais, insiste-t-elle, « les conditions d’une telle exécution ne doivent pas avoir pour objet de priver la personne reconduite du droit de solliciter de la Cour l’indication d’une mesure provisoire ». En l’espèce, le renvoi du requérant vers le Maroc a eu lieu environ cinq heures après la notification de la décision d’expulsion. « Le requérant n’a pas disposé d’un délai suffisant pour demander de façon effective à la Cour la suspension d’une décision que l’Etat défendeur avait pourtant déjà prise de longue date. »