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L’incomplétude de la formule exécutoire constitue une irrégularité pour vice de forme

Un créancier ne peut mettre en œuvre des mesures d’exécution forcée qu’en présence d’un titre doté de la force exécutoire. Celle-ci dépend de plusieurs conditions, dont la présence obligatoire, sauf disposition contraire, de la formule exécutoire. L’absence ou l’incomplétude de la formule exécutoire constitue une irrégularité pour vice de forme, dont la nullité suppose nécessairement la preuve d’un grief.

En l’absence de paiement de son débiteur, un créancier ne peut mettre en œuvre des mesures d’exécution forcée que s’il détient un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, au sens de l’article L. 111-2 du code des procédures civiles d’exécution. Les titres pouvant servir de fondement aux mesures d’exécution forcée sont limitativement énumérés par le législateur (C. pr. exéc., art. L. 111-3), et comprennent, par exemple, les décisions de l’ordre judiciaire ou administratif, les jugements étrangers, les actes notariés, etc. L’exécution régulière du titre nécessite toutefois la réunion de plusieurs conditions, notamment celles relatives à la force exécutoire, laquelle est qualifiée de qualité ou d’attribut (Civ. 2e, 18 févr. 2016, nos 15-13.991, 15-13.945 et 15-15.778, Dalloz actualité, 7 mars 2016, obs. M. Kebir ; D. 2016. 1279, obs. A. Leborgne ; RTD civ. 2016. 442, obs. P. Théry ; JCP 2016. 584, note N. Cayrol).

La force exécutoire est subordonnée à des conditions générales, applicables à tous les titres exécutoires, et à des conditions spéciales, propres à certains d’entre eux. Parmi les conditions générales, s’y trouvent la formule exécutoire, dont la rédaction est prévue à l’article 1er du décret n° 47-1047 du 12 juin 1947, la connaissance du titre, la constatation par le titre d’une créance liquide et exigible, la désignation du créancier et du débiteur dans le titre, etc. S’agissant des conditions spéciales, et en se référant uniquement au jugement, son simple prononcé ne suffit pas à lui conférer force exécutoire. La loi impose en effet des conditions supplémentaires. D’une part, la décision de justice doit être passée en force de chose jugée, c’est-à-dire qu’aucune voie de recours suspensive d’exécution ne doit être ouverte, sauf si le débiteur bénéficie d’un délai de grâce ou si le créancier dispose de l’exécution provisoire (C. pr. civ., art. 501). D’autre part, elle doit être signifiée au débiteur par un commissaire de justice, sauf disposition légale contraire (C. pr. civ., art. 503 et 675). L’arrêt commenté précise la sanction attachée au non-respect de la formule exécutoire pour l’ensemble des titres exécutoires.

Reprenons les faits de l’affaire. Sur le fondement d’une ordonnance du 1er septembre 2016, délivrée par le premier président de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence rendant exécutoire le rôle des cotisations dues (CSS, anc. art. L. 723-6 ; art. L. 652-11), la Caisse nationale des barreaux français a fait délivrer, le 30 novembre 2016, un commandement aux fins de saisie-vente à son débiteur. En sus de la saisie-vente, le créancier a également diligenté une saisie-attribution le 12 janvier 2017. En première instance et en appel, le débiteur a sollicité l’annulation du commandement aux fins de saisie-vente et la mainlevée de la saisie-attribution. Cependant, son argumentaire n’a pas convaincu les juges du fond, qui ont confirmé les saisies pratiquées. Le débiteur forma un pourvoi en cassation.

Devant les magistrats du quai de l’Horloge, il a articulé sa défense autour deux axes. Le premier moyen, qui n’a pas emporté la conviction de la Cour de cassation, portait sur l’étendue des pouvoirs du juge de l’exécution, en particulier la possibilité pour celui-ci de remettre en cause un titre exécutoire judiciaire. Le second moyen, quant à lui, concernait la nécessité de présenter une expédition revêtue de la formule exécutoire.

La question posée était la suivante : le rôle des cotisations dues à la Caisse nationale des barreaux français, rendu exécutoire par une ordonnance du premier président d’une cour d’appel, doit-il respecter l’article 502 du code de procédure civile, qui impose la formule exécutoire pour la régularité du titre ? Les juges du fond avaient répondu par la négative, position censurée par la Cour de cassation. Celle-ci a rappelé que la formule exécutoire est obligatoire, sauf disposition contraire de la loi, ce que ne prévoyait pas l’ancien article L. 723-9 du code de la sécurité sociale (Civ. 2e, 20 mai 2021, n° 19-22.553, Dalloz actualité, 1er juin 2021, obs. G. Payan ; RTD civ. 2021. 706, obs. N. Cayrol ; Procédures 2021. Comm. 191, obs. R. Laher).

L’affaire a été renvoyée à la Cour d’appel de Montpellier, qui, par un arrêt du 14 avril 2022, a confirmé la décision du juge de l’exécution rejetant les...

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