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L’inégalité de traitement entre créanciers au crible de l’article 6 de la Déclaration de 1789

« Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que l’inégalité de traitement soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit. »

Discipline collective et égalité entre créanciers ne se conçoivent pas l’une sans l’autre. La seconde constitue la clef de voûte de la première (v. not., F. Pérochon, La discipline collective, in Les grands concepts du droit des entreprises en difficulté, P.-M. Le Corre [dir.], Dalloz, coll. « Thèmes et commentaires », 2018, p. 1 s. ; A. Chapon-Le Brethon, Le principe d’égalité entre créanciers, LGDJ, coll. « Bibliothèque droit des entreprises en difficulté », t. 25, 2021). Il s’agit d’une constante historique qui rend acceptable la « collectivisation » des poursuites dès l’ouverture de la procédure collective du débiteur puisque en faisant échec au paiement au prix de la course, les créanciers sont assurés d’un égal accès au gage commun (M. Sénéchal, L’effet réel de la procédure collective. Essai sur la saisie collective du gage commun des créanciers, Litec, coll. « Bibliothèque de droit de l’entreprise », t. 59, 2002, n° 418).

Égalité formelle et égalité matérielle entre créanciers : quelle option ?

L’égalité entre créanciers dont il est ici question doit cependant être bien comprise. Il ne s’agit pas d’une égalité dite « formelle », c’est-à-dire réfractaire à la culture de la différence. Tout au contraire, elle est une égalité matérielle qui s’accommode de tempéraments et ne proscrit donc pas le régime de l’exception. Mais encore faut-il que celle-ci soit justifiée pour que la différence de traitement, et donc de règle, soit acceptée. C’est précisément ce que l’arrêt rendu par la chambre commerciale, le 6 mars dernier, rappelle.

On peut y lire que « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général » à la condition toutefois que la liberté de traitement laissée au législateur soit « dans l’un et l’autre cas, (…) en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ». Le rappel est d’autant plus exemplaire qu’il est fait en réponse à l’examen d’une question prioritaire de constitutionnalité à l’aune du principe d’égalité devant de la loi de l’article 6 de la Déclaration de 1789.

Article L. 211-40 du code monétaire et financier versus Livre VI du code de commerce

Étaient en cause les dispositions de l’alinéa 1er de l’article L. 211-40 du code monétaire et financier qui énoncent que « les dispositions du Livre VI du code de commerce, ou celles régissant toutes procédures judiciaires ou amiables...

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