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Licéité des clauses statutaires d’exclusion dans les sociétés commerciales à capital variable ne précisant pas les motifs d’exclusion

Il résulte de l’article L. 231-6, alinéa 2, du code de commerce qu’est licite une clause des statuts d’une société commerciale à capital variable stipulant que tout associé peut être exclu de la société pour justes motifs par une décision des associés réunis en assemblée générale statuant à la majorité fixée pour la modification des statuts, quand bien même cette clause ne précise pas les motifs d’exclusion.

par Martin Brunet et Léa Benedettile 16 décembre 2022

Dans cet arrêt de rejet rendu le 9 novembre 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation affirme le principe selon lequel une clause statutaire d’exclusion est licite dans les sociétés à capital variable y compris lorsque cette clause reste silencieuse sur les motifs justifiant l’exclusion.

En l’espèce, les statuts d’une société à responsabilité limitée (SARL) à capital variable, la société Solico, stipulaient que tout associé pouvait être exclu pour justes motifs par une décision des associés réunis en assemblée générale statuant à la majorité fixée pour la modification des statuts.

Lors de l’assemblée générale de la société, les associés ont voté l’exclusion de cet associé. Ce dernier assigne alors la société en annulation de la clause d’exclusion.

Débouté en appel, il forme un pourvoi en cassation dans lequel il reproche à l’arrêt attaqué de retenir que la clause statutaire d’exclusion est licite alors qu’une telle clause stipulant la faculté d’exclure un associé ne devrait l’être que si elle précise les causes justifiant cette exclusion.

Il apparaît d’ailleurs important de souligner que le motif d’exclusion invoqué par la société Solico et considéré comme constituant un juste motif par la cour d’appel apparaissait de prime abord pour le moins léger.

Plus précisément, le motif concernait un contentieux prud’homal opposant l’associé exclu au GIE Les Indépendants (dont la société Solico était membre). Or le règlement intérieur du GIE, récemment modifié, prévoyait que la société Solico pouvait être exclue dudit GIE en raison de l’existence d’un contentieux entre le GIE et son associé. Ce risque d’exclusion pesant sur la société Solico a été jugé contraire à son intérêt social par la cour d’appel car l’essentiel des ressources de cette dernière provenait des recettes publicitaires dont elle bénéficiait en sa qualité de membre du GIE.

Autrement dit, le motif tiré d’un simple risque d’exclusion du GIE pour la société – risque qui ne s’est pourtant pas concrétisé – constituait, selon la cour d’appel, un motif grave et donc un juste motif, privant ainsi la décision d’exclusion de son caractère abusif.

Les arguments invoqués par l’associé en appel ne manquaient pourtant pas de pertinence à première vue. Il faisait valoir en effet que le conseil d’administration du GIE avait implicitement renoncé à sa décision d’exclure la société Solico. Par ailleurs, il rappelait que la disposition même du règlement intérieur du GIE avait été reconnue contraire à l’ordre public concurrentiel.

Mais, à hauteur de cassation, ce sont en réalité les termes mêmes de la clause, et notamment son caractère relativement vague, qui ont fait l’objet d’un litige.

En effet, l’associé exclu a soutenu que la cour d’appel avait violé les articles 1382, devenu 1240, du code civil ainsi que l’article L. 236-1 du code de commerce en faisant valoir qu’une clause statutaire stipulant la faculté d’exclure un associé n’est licite que si elle précise les causes justifiant une exclusion, le simple fait de mentionner des justes motifs ne suffisant pas.

Rejetant cette critique, la Cour de cassation a cependant jugé qu’il résulte de l’article L. 231-6, alinéa 2, du code de commerce, qu’est « licite une clause des statuts d’une société commerciale à capital variable stipulant que tout associé peut être exclu de la société pour justes motifs par une décision des associés réunis en assemblée générale statuant à la majorité fixée pour la modification des statuts, quand bien même cette clause ne précise pas les motifs d’exclusion ».

Plusieurs remarques nous semblent pouvoir être faites à propos de cette solution.

Licéité d’une clause statutaire d’exclusion dans une société à capital...

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