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Article
Loi Badinter : exclusion des marchandises, objets d’un contrat de transport
Loi Badinter : exclusion des marchandises, objets d’un contrat de transport
La loi Badinter, qui tend à assurer une meilleure protection des victimes d’accidents de la circulation, n’a pas pour objet de régir l’indemnisation des propriétaires de marchandises endommagées à la suite d’un tel accident, survenu au cours de leur transport par le professionnel auquel elles ont été remises, en exécution d’un contrat de transport.
par Amandine Cayol, Maître de conférences, Université Caen Normandiele 14 avril 2022
Il est de jurisprudence constante que la loi Badinter est d’application exclusive : « L’indemnisation d’une victime d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ne peut être fondée que sur les dispositions de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 à l’exclusion de celles des articles 1382 et suivants du code civil » (Civ. 2e, 4 mai 1987, n° 85-17.051). Le juge est tenu « pour trancher le litige de faire application, au besoin d’office, des dispositions d’ordre public de la loi du 5 juillet 1985 » (Civ. 2e, 5 juill. 2018, n° 17-19.738, Dalloz actualité, 13 sept. 2018, obs. A. Hacene ; D. 2018. 1489 ; ibid. 2019. 1196, obs. M. Bacache, L. Grynbaum, D. Noguéro et P. Pierre ; RTD civ. 2018. 928, obs. P. Jourdain ; sur le caractère d’ordre public de la loi Badinter, v. déjà Civ. 2e, 13 janv. 1988, n° 86-10.142 P). Le projet de réforme de la responsabilité civile, présenté par la Chancellerie en mars 2017, reprend cette solution, affirmant que les dispositions relatives à la responsabilité du « fait des véhicules terrestres à moteur » sont d’ordre public (art. 1285, al. 2). Il est dès lors particulièrement important de déterminer avec précision le champ d’application du régime issu de la loi Badinter. L’arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 31 mars 2022 apporte une utile précision sur ce point dans l’hypothèse d’un dommage causé à une marchandise transportée dans le cadre d’un contrat de transport lors de son déchargement.
En l’espèce, une grue-pelle fait l’objet d’un contrat de transport de marchandises. Lors de son déchargement, l’engin bascule et chute au sol. Après avoir indemnisé son propriétaire, l’assureur assigne le transporteur – ainsi que l’assureur de ce dernier – en remboursement des sommes versées sur le fondement de la loi Badinter. Le propriétaire leur demande, sur le même fondement, indemnisation de la franchise restée à sa charge et des frais d’expertise. Le transporteur et son assureur soulèvent alors l’incompétence du tribunal de grande instance au profit du tribunal de commerce. Cette exception est rejetée par le juge de la mise en état. La cour d’appel confirme son ordonnance, aux motifs que « l’indemnisation de la victime d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ne peut être fondée que sur les dispositions d’ordre public de la loi du 5 juillet 1985 » (pt 11). Or la grue-pelle répondait bien à la définition du véhicule terrestre à moteur, et était en mouvement au moment de l’accident.
Le régime de responsabilité issu de la loi du 5 juillet 1985 est, en effet, applicable, aux termes de son article premier, aux accidents de la circulation dans lesquels est impliqué au moins un véhicule terrestre à moteur (VTAM). Contrairement au code de la route et au code des assurances, la loi du 5 juillet 1985 ne définit pas la notion de VTAM. La jurisprudence a progressivement posé plusieurs critères pour retenir cette qualification. Il résulte, tout d’abord, expressément de l’article 1er de la loi Badinter que l’engin concerné doit être un « véhicule », ce qui suppose qu’il soit destiné au transport de personnes...
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