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Au titre de la loi sur les fausses informations, deux élus communistes ont demandé le retrait d’un tweet du ministre de l’intérieur concernant la Pitié-Salpêtrière. Le tribunal de grande instance a rendu sa décision vendredi et a rejeté la demande : aucun des critères nécessaires pour retirer un contenu n’était respecté.
par Pierre Januel, avec Marine Babonneaule 21 mai 2019
La députée européenne Marie-Pierre Vieu et le sénateur Pierre Ouzoulias contestaient un tweet diffusé par Christophe Castaner le 1er mai : « Ici, à la Pitié-Salpêtrière, on a attaqué un hôpital. On a agressé son personnel soignant. Et on a blessé un policier mobilisé pour le protéger. Indéfectible soutien à nos forces de l’ordre : elles sont la fierté de la République ».
S’appuyant sur la loi fausse information, les deux élus ont saisi le 10 mai le tribunal de grande instance de Paris en référé pour demander à Twitter France le retrait de ce tweet. L’audience a eu lieu six jours plus tard et la décision a été rendue le 17 mai. L’urgence est donc ici relative.
Sur le fond, le tribunal a rappelé le caractère très restrictif de l’article L. 163-2 du code électoral. Pour permettre le retrait d’un contenu en période électorale, l’assignation doit viser des « allégations ou imputations inexactes ou trompeuses » d’un « fait de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir » et diffusées « de manière délibérée, artificielle ou automatisée et massive par le biais d’un service de communication au public en ligne » (v. Dalloz actualité, 9 janv. 2019, obs. M.-C. de Montecler isset(node/193848) ? node/193848 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>193848).
D’abord, la société Twitter France a justifié que sa seule activité était de monétiser le réseau d’informations de Twitter International, qui est le véritable responsable du traitement des données. La SAS Twitter France a donc été mise hors de cause et Twitter International Company a pu faire une intervention volontaire, tout comme Christophe Castaner.
Sur le fond, le tribunal a d’abord cherché à établir le caractère inexact ou trompeur des allégations contenues dans le tweet. En s’appuyant sur plusieurs articles de presse produits par les parties, le tribunal a considéré « que, si le message rédigé par monsieur Christophe Castaner apparaît exagéré en ce qu’il évoque le terme d’attaque et de blessures, cette exagération porte sur des faits qui, eux, sont réels, à savoir l’intrusion de manifestants dans l’enceinte de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière le 1er mai 2019 ». L’information n’est donc pas dénuée de tout lien avec des faits réels et l’allégation n’est pas « manifestement inexacte ou trompeuse ».
Pour le juge des référés, la diffusion doit également être cumulativement « massive, artificielle ou automatisée, et délibérée, et opérer sur un service de communication au public en ligne ». Selon l’exposé des motifs de la proposition de loi, le caractère « artificiel ou automatisé » s’établit par le paiement de tiers chargés d’étendre artificiellement la diffusion de l’information ou le recours à des bots. Ce second critère manque également.
Enfin, le juge des référés doit apprécier le caractère manifeste du risque d’altération de la sincérité du scrutin. Pour les deux élus, « les propos du ministre de l’intérieur visent à faire croire à un climat de violence pour faire jouer le ressort de la peur et du chaos, ce qui ne peut que perturber la campagne des élections européennes ». Mais pour le tribunal, « si le tweet a pu employer des termes exagérés, il n’a pas occulté le débat, puisqu’il a été immédiatement contesté », « permettant à chaque électeur de se faire une opinion éclairée, sans risque manifeste de manipulation ».
En conséquence, les conditions posées par l’article L. 163-2 du code électoral ne sont pas remplies et il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de retrait. Les deux élus sont condamnés aux dépens. Une décision qui démontre le caractère très restrictif du référé créé par la loi. Le juge des référés n’a pas vocation à être l’arbitre des polémiques électorales.
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