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Mandat d’arrêt européen : le recul du contrôle de la double incrimination

Lors de l’exécution du mandat d’arrêt européen, la double incrimination n’a pas à être vérifiée si le motif de refus facultatif, en présence de faits qui ne constituent pas une infraction au regard de la loi française, n’est pas soulevé. À l’inverse, si son application est évoquée, le contrôle de la réciprocité d’incrimination demeure nécessaire, sauf si deux conditions cumulatives sont remplies. 

Les instruments de reconnaissance mutuelle, tels que le mandat d’arrêt européen (ci-après, MAE), visent à faciliter la circulation des décisions judiciaires au sein de l’Union européenne avec, parfois, le soutien déterminé de la chambre criminelle, laquelle évince tout obstacle à leur mise en œuvre comme en témoigne l’arrêt rendu le 29 mai 2024.

Une chambre de l’instruction a autorisé la remise d’un individu, sur le fondement de trois MAE aux fins de poursuites pour diverses infractions et d’exécution de deux peines d’emprisonnement prononcées les 20 septembre 2012 et 5 février 2013. La personne recherchée avait accepté sa remise sans renoncer au principe de spécialité (§ 2). Ce dernier interdit traditionnellement à l’État ayant obtenu la remise d’une personne de la poursuivre, de la priver de liberté ou de la remettre à un autre État pour une infraction antérieure à la remise et différente de celle l’ayant justifiée.

Les autorités judiciaires françaises d’exécution de l’instrument ont été saisies d’une demande d’extension des effets de la remise aux fins d’exécution d’autres peines d’emprisonnement prononcées le 11 janvier 2022 (§ 3). À ce titre, l’intéressé a déclaré ne pas y consentir pour des infractions autres que celles pour lesquelles il avait été remis sur le fondement des MAE (§ 4). Pour autant, la chambre de l’instruction l’a autorisée après avoir évincé l’exigence de la double incrimination. Selon elle, cette dérogation s’applique à deux conditions alternatives : si les faits reprochés entrent dans l’une des trente-deux catégories d’infractions listées exhaustivement (C. pr. pén., art. 694-32) ou si ces faits constituent une infraction en droit français (§§ 6 et 8). En somme, la première condition ayant été vérifiée, la dérogation pouvait s’appliquer, écartant alors le contrôle de la réciprocité d’incrimination.

La personne faisant l’objet de la remise a donc formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la chambre de l’instruction, autorisant l’extension des effets du MAE. Selon elle, il existe deux conditions cumulatives et non alternatives (§ 5). Les faits reprochés doivent : d’une part,...

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