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Notion d’accident de la circulation : limitation du champ d’application de la loi Badinter

Ne constitue pas un accident de la circulation, la chute d’une victime sur un véhicule en stationnement dans un garage privé lorsqu’aucun des éléments liés à sa fonction de déplacement n’est à l’origine de l’accident.

La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 visant « à l’amélioration de la situation des victimes d’accident de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation », dite « loi Badinter », a mis en place un système de réparation du dommage particulièrement favorable pour les victimes. Les causes d’exonération du responsable sont retenues de manière restrictive (art. 2), particulièrement concernant les dommages corporels subis par des victimes non conductrices (art. 3). Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité sont, en outre, assouplies par rapport au droit commun de la responsabilité civile. Tout recours au concept de causalité a effet été abandonné pour retenir celui d’implication (art. 1), issu de l’article 4 de la Convention de La Haye sur la loi applicable en matière d’accident de la circulation routière. Encore faut-il, toutefois, pour bénéficier de ce régime, avoir été victime d’un accident de la circulation. Il convient, dès lors, de parvenir à circonscrire les limites de cette notion (sur laquelle, v. A. Cayol, « Responsabilité du fait des accidents de la circulation », in R. Bigot et F. Gasnier [dir.],Lexbase, Encyclopédie. Droit de la responsabilité civile, 9 mai 2022 ; R. Bigot et A. Cayol, Le droit de la responsabilité civile en tableaux, Ellipses, 2022, p. 314). Bien qu’elle soit traditionnellement comprise de manière extensive, cette dernière ne saurait englober les hypothèses où un véhicule terrestre à moteur est présent lors d’un accident sans lien direct avec la circulation. Une doctrine autorisée s’interrogeait ainsi : « Ne serait-il pas audacieux de rattacher à la circulation routière l’hypothèse, parfois prise comme exemple, d’une victime défenestrée dont le corps viendrait s’écraser sur un véhicule en stationnement ? » (G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, Les régimes spéciaux de l’assurance de responsabilité, 4e éd., LGDJ, 2017, n° 100, p. 132). Ce cas d’école vient d’être soumis à l’appréciation de la Cour de cassation le 7 juillet 2022.

En l’espèce, une personne, effectuant des travaux sur le toit de son garage, tombe au travers de la lucarne du garage de son voisin, heurtant dans sa chute le véhicule de ce dernier qui y était stationné. La victime assigne l’assureur dudit véhicule en indemnisation de ses préjudices. La cour d’appel fait droit à sa demande en retenant l’existence d’un accident de la circulation, au sens de l’article 1er de la loi du 5 juillet 1985. Selon elle, « le stationnement d’un véhicule terrestre à moteur constitue en tant que tel un fait de circulation » (pt 5). Sa décision est cassée par la deuxième chambre civile, au visa de l’article 1er de la loi Badinter, aux motifs que « ne constitue pas un accident de la...

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