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Nouveaux développements sur la prise en compte de la concurrence par la protection des données !

Faisant suite à une mission de réflexion portant sur l’articulation entre protection des données et concurrence, les conclusions publiées le 19 décembre 2024 formulent une quinzaine de propositions visant à renforcer la prise en compte de la concurrence dans la protection des données, une perspective jusqu’ici peu développée, tant en termes d’analyse que de coopération.

Si les développements relatifs à la prise en compte de la protection des données en matière de concurrence continuent d’alimenter l’actualité juridique, tant au niveau européen que national, c’est relativement moins le cas en ce qui concerne la prise en compte de la concurrence en matière de protection des données. Cela étant, les lecteurs se souviendront probablement que l’arrêt Meta Platforms de la CJUE du 4 juillet 2023 (CJUE 4 juill. 2023, aff. C-252/21, Dalloz actualité, 14 sept. 2023, obs. V. Giovannini ; AJDA 2023. 1542, chron. P. Bonneville, C. Gänser et A. Iljic ; D. 2023. 1313 ; Dalloz IP/IT 2024. 45, obs. A. Lecourt ; RTD eur. 2023. 754, obs. L. Idot ) a notamment ouvert la voie aux autorités nationales de protection des données pour prendre en compte les concepts du droit de la concurrence au soutien de leurs propres analyses. On y reviendra.

Dans ce sillage, il s’avère que, le 19 décembre 2024, des conclusions faisant suite à la mission de réflexion confiée à M. Bruno Lasserre, président de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) et ancien président de l’Autorité de la concurrence, par Mme Marie-Laure Denis, présidente de la Commission nationale informatique et libertés (CNIL), concernant l’articulation entre protection des données et concurrence ont été publiées.

Lesdites conclusions s’inscrivent également dans la continuité de la déclaration conjointe de l’Autorité de la concurrence et de la CNIL (CNIL et Aut. conc., Concurrence et données personnelles : une ambition commune – Déclaration conjointe de l’Autorité de la concurrence et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, 12 déc. 2023), en ce qu’elles visent à approfondir les « synergies » entre les deux cadres de régulation, mais – et on leur en sait gré de le rappeler – sans jamais céder à la tentation de fusionner ces règles juridiques et les mandats de ces autorités. Il ne s’agit pas tant, pour reprendre les termes qui figurent dans les conclusions, de parvenir à une « reconnaissance mutuelle », c’est-à-dire à une intégration des deux cadres, mais à une « inspiration mutuelle », en vue de favoriser une convergence entre ces régulations, caractéristique de l’« interrégulation » (M.-A. Frison-Roche, L’hypothèse de l’interrégulation, in Les risques de régulation, M.-A. Frison-Roche [dir.], Sciences Po et Dalloz, 2005, p. 70).

Dans cette optique, les conclusions précitées formulent une quinzaine de propositions. Elles posent les principes de cette articulation renforcée entre protection des données et concurrence avant d’en tirer toutes les conséquences en termes de coopération.

Les principes de l’articulation entre protection des données et concurrence

Les conclusions rappellent d’abord l’essor et, par conséquent, l’importance de la collecte et de l’utilisation massives de données, dont la plupart ont un caractère personnel, dans les modèles d’affaires de l’économie numérique, soulignant ainsi le lien étroit entre protection des données et concurrence (v. déjà en ce sens, V. Giovannini, Données massives et droit de la concurrence, préf. D. Bosco, Bruylant, 2024). Il s’avère, en effet, que la protection de la vie privée et des données personnelles est un paramètre de concurrence, dont certaines entreprises peuvent tirer profit, puisqu’il leur permet de se différencier de leurs concurrents, et ainsi de faire émerger des formes de concurrence par l’innovation dans ce domaine....

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