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Nouvelle loi sur la crise sanitaire : le volet social

Définitivement adoptée le 10 juin après le vote du Sénat, la loi qui comprend trente-trois habilitations à légiférer par ordonnance, a pour objet principal de faire face à la crise majeure que la France traverse sur le plan sanitaire et à la gravité des conséquences de cette crise sur la vie du pays, par diverses mesures venant compléter celle déjà prises sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Sous réserve d’une saisine des Sages, voici les principales dispositions de ce texte intéressant le droit social.

par Caroline Dechristéle 15 juin 2020

Activité partielle spécifique

Une des mesures phare de ce texte est issue d’un amendement déposé par le gouvernement au Sénat et élaboré par la Commission mixte paritaire et concerne encore une fois l’activité partielle. La loi prévoit en effet d’adapter le régime applicable à l’activité partielle dans le contexte du déconfinement et de la reprise progressive de l’activité ; l’objectif étant la possibilité d’adapter les règles de recours au dispositif en fonction de l’entreprise ou des salariés et la garantie de la continuité des droits des travailleurs concernés. Une attention particulière pourra ainsi être portée aux secteurs qui ont fait l’objet d’une fermeture administrative (hôtellerie, restauration, événementiel) et ceux qui en dépendent.

Est ainsi créé un nouveau régime d’activité partielle spécifique pour les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable sans être de nature à compromettre leur pérennité, le dispositif d’« activité réduite pour le maintien en emploi ».

Pour le mettre en place, ce dispositif et subordonné à la conclusion d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe et si un accord collectif de branche existe, l’employeur, pourra également avoir droit au dispositif en élaborant après consultation du CSE s’il existe, un document unilatéral de « plan d’activité réduite pour le maintien dans l’emploi ».

Le contenu de l’accord ou du document unilatéral sera précisée par décret et devrait comporter la durée de son application, les activités et les salariés concernés par l’activité partielle spécifiques, les réductions d’horaires de travail pouvant donner lieu à indemnisation et les engagements spécifiquement souscrits en contrepartie pour le maintien en emploi.

Le validation de l’accord ou l’homologation du document unilatéral par l’autorité administrative (Dirrecte) serait alors allégé dans le premier cas et, dans le second, il est prévu la vérification de l’adéquation des mesures retenues avec la situation de l’entreprise, de la régularité de la procédure d’information et de consultation du CSE lorsqu’il existe, de la présence dans l’accord de l’ensemble des dispositions obligatoires, de la conformité aux stipulations de l’accord de branches et de la présence d’engagements spécifiques en matière d’emploi .

En cas d’accord collectif l’aide de l’État pourrait également être plus élevée.

Ce dispositif demeure un dispositif d’urgence mais les demandes pourront être adressées jusqu’au 30 juin 2022.

Par ailleurs le texte prévoit qu’un accord d’entreprise ou de branche peut autoriser l’employeur à imposer aux salariés placés en activité partielle bénéficiant du maintien intégral de leur rémunération d’affecter des jours de repos conventionnels ou une partie de leur congé annuel excédant vingt-quatre jours ouvrables à un fonds de solidarité pour être monétisés en vue de compenser tout ou partie de la diminution de rémunération subie, le cas échéant, par les autres salariés placés en activité partielle.

Contrats courts

Toujours dans l’objectif de faciliter la reprise d’activité des entreprises, la loi prévoit diverses mesures dérogatoires au droit commun en matière de réglementation du contrat de travail. Il est prévu qu’un accord collectif d’entreprise pourra, jusqu’au 31 décembre 2020, fixer le nombre maximal de renouvellements des contrats à durée déterminée ainsi que les modalités de calcul du délai de carence entre deux contrats. De la même manière, des mesures d’urgence pourront être prises afin de permettre la prolongation des contrats d’insertion qui n’ont pas pu se dérouler dans les conditions prévues compte tenu de la crise sanitaire. Les entreprises pourront également par accord collectif instaurer une solidarité entre les salariés ou prévoir la monétisation, du 12 mars au 31 décembre 2020, des jours de repos ou de congés payés dans la limite de cinq jours.

Prêt de main-d’œuvre

Les mesures dérogatoires au droit commun du contrat de travail concernent également le prêt de main-d’œuvre. L’objectif est d’en faciliter le recours compte-tenu d’une reprise inégale de l’activité faisant coexister la surmobilisation de certains secteurs d’activité et la sous-mobilisation d’autres. Jusqu’au 31 décembre 2020, la convention de mise à disposition entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice pourra porter sur la mise à disposition de plusieurs salariés, le formalisme de la convention de mise à disposition sera allégé (notamment concernant la précision relative aux horaires d’exécution du travail en effet seul devra être précisé le volume hebdomadaire des heures de travail durant lesquelles le salarié est mis à disposition). Lorsque l’intérêt de l’entreprise utilisatrice le justifie et qu’elle relève de secteurs d’activité particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale déterminés par décret, les opérations de prêt de main-d’œuvre n’auraient pas de but lucratif pour les entreprises utilisatrices même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice serait inférieur ou égale à zéro au salaire versé au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition temporaire.

Intéressement

Le texte prévoit également la possibilité pour les très petites entreprises de mettre en place des dispositifs d’intéressement au moyen d’une décision unilatérale de l’employeur. Cette décision unilatérale vaudrait accord d’intéressement au sens du code général des impôts et du code du travail.

Enfin le texte prévoit l’acquisition de droits à la retraite pour les salariés placés en activité partielle ou encore la prolongation des indemnités des demandeurs d’emploi dès le 1er mars 2020.

Loi portant diverses dispositions urgentes pour faire face aux conséquences de l’épidémie de covid-19, adoptée définitivement le 10 juin au Sénat.