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Nouvelles précisions sur la disproportion du cautionnement et sur le devoir de mise en garde

L’arrêt du 5 janvier 2022 rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation est l’occasion de venir préciser de nombreuses questions en matière de droit du cautionnement, notamment au sujet de la disproportion de l’engagement. La décision permet également de mieux asseoir la jurisprudence sur le point de départ de la prescription de diverses actions liées aux manquements du créancier quant au devoir de mise en garde ou à l’obligation d’information annuelle.

Après avoir évoqué les questions de point de départ de la prescription des actions menées par l’emprunteur lui-même avec quatre arrêts rendus le 5 janvier 2022 autour d’un prêt à intérêts (Civ. 1re, 5 janv. 2022, quatre arrêts n° 20-16.031, n° 19-24.436, n° 20-18.893 et n° 20-16.350, Dalloz actualité, 17 janv. 2022, obs. C. Hélaine), voici que nous évoquons des questions connexes qui ont trait non au prêt mais au cautionnement qui permettait d’en assurer le paiement. Les interrogations étudiées sont d’autant plus d’actualité qu’elles appelleront quelques changements avec l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 (Réforme du droit des sûretés : saison 2 (partie I, II et III), sous la dir. de J.-D. Pellier, Dalloz actualité, 27 sept. 2021) dont les décrets d’application viennent d’être publiées il y a quelques jours (J.-D. Pellier, Réforme du droit des sûretés : le décret d’application publié, Dalloz actualité, 7 janv. 2022). Le sentiment donné par une lecture d’ensemble de ces décisions est celui du parachèvement de la question de la prescription et de son point de départ tant en droit des contrats spéciaux qu’en droit des sûretés. Rendus le même jour, ces arrêts permettent à la pratique de mieux déterminer chaque point de départ pris isolément. Dans le contentieux spécifique du cautionnement, c’est à la lueur de la disproportion de l’engagement conclu que le contentieux s’est noué dans le pourvoi n° 20-17.325.

Tout commence assez banalement avec la conclusion d’un contrat de prêt d’argent. En l’espèce, un établissement bancaire consent le 2 août 2006 à une société civile immobilière un prêt de 129 970 €. Le prêt est garanti par une caution professionnelle puis, dans un second temps, par deux personnes physiques. À partir du 15 août 2013, des échéances impayées s’accumulent si bien que l’établissement bancaire prononce la déchéance du terme le 8 février 2015. Quelques mois plus tard, la caution professionnelle règle le créancier mais elle se retourne fort logiquement contre la société civile immobilière débitrice principale ainsi que les co-cautions par voie d’assignation. Ces dernières assignent en intervention forcée et appellent en garantie l’établissement bancaire en arguant plusieurs manquements sur trois sujets différents : la proportionnalité du cautionnement, l’information annuelle des cautions et le devoir de mise en garde du prêteur de deniers. Plusieurs demandes étaient donc articulées et nous les étudierons en deux temps afin de mieux en exposer les solutions avancées.

De l’effet de la disproportion de l’engagement de la caution

Le premier moyen pris en sa première branche est l’occasion d’une discussion autour de l’exigence de proportionnalité du cautionnement qui fait l’objet de l’article L. 332-1 du code de la consommation (J.-D. Pellier, Droit de la consommation, 3e éd., Dalloz, coll. « Cours », 2021, p. 225, n° 172). En cause d’appel, les juges du fond avaient écarté le moyen tiré de la disproportion du cautionnement en estimant que la caution professionnelle – étranger au contrat de prêt – ne pouvait pas se voir opposer par les cautions les exceptions et moyens opposables au créancier principal comme la disproportion de leur engagement de caution. Le moyen faisait donc grief de condamner les...

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