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Nullité des saisies-contrefaçons : la Cour de cassation limite les dégâts

L’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 14 novembre 2024 s’inscrit dans le contentieux pléthorique de la nullité des procédures de saisie-contrefaçon. Il confirme avec vigueur le régime de la nullité de la saisie-contrefaçon, tout en y apportant une plus grande clarté, ce qui lui vaut les honneurs d’une publication au Bulletin et justifie que l’on s’y arrête.

Deux sociétés titulaires de droits sur une obtention végétale ont sollicité l’autorisation de faire procéder à des opérations de saisie-contrefaçon à l’encontre de deux autres sociétés suspectées de contrevenir à leurs droits de propriété industrielle.

Les 16 et 18 février 2016, le président du Tribunal de grande instance de Paris a fait droit à leurs demandes et les opérations de saisies-contrefaçon ont été menées le 16 mars suivant.

Le 13 mars 2020, le Tribunal judiciaire de Paris a refusé de prononcer la nullité des quatre procès-verbaux de saisies-contrefaçons, qui était sollicitée par les sociétés poursuivies en contrefaçon, et les a condamnées pour contrefaçon du certificat d’obtention végétale des demanderesses (TJ Paris, 13 mars 2020, n° 16/05332).

Les sociétés poursuivies ont interjeté appel du jugement et ont de nouveau contesté la validité des opérations de saisie-contrefaçon. Elles arguaient notamment que le commissaire de justice avait instrumenté en dehors des limites géographiques auxquelles l’ordonnance l’avait strictement restreint. Le commissaire de justice était en effet autorisé à instrumenter à l’adresse du saisi et/ou en tous terrains et locaux dépendant de la société du saisi. Or, au cours de l’exécution de la saisie-contrefaçon, le commissaire de justice est allé saisir les livres comptables et les bilans d’exercice clos chez l’expert-comptable du saisi. Partant, les sociétés saisies sollicitaient l’annulation des procès-verbaux résultant des opérations de saisie-contrefaçon.

Le 9 mars 2016, la Cour d’appel de Paris (Paris, 9 mars 2016, n° 20/08885) a infirmé le jugement de première instance et annulé l’ensemble des procès-verbaux qui avaient été établis dans le cadre des opérations de saisie pratiquées, soulignant que : « les termes d’une ordonnance autorisant une saisie-contrefaçon, mesure coercitive exorbitante du droit commun, doivent s’interpréter strictement, et que l’huissier de justice ne doit pas outrepasser les pouvoirs qu’il détient en vertu de l’ordonnance le désignant pour y procéder ». Conséquence de ces annulations, la Cour d’appel a rejeté toutes les demandes formées sur la contrefaçon, faute de preuve des actes de contrefaçon reprochés.

Saisie du litige, la Cour de cassation devait apprécier l’étendue de la nullité des procès-verbaux de saisie-contrefaçon querellés.

Les sociétés à l’initiative des opérations de saisie-contrefaçon faisaient en effet valoir au soutien de leur pourvoi que seules les opérations affectées par l’irrégularité, qu’elles reconnaissaient donc, encourraient la nullité et non l’ensemble des procès-verbaux.

Confirmation d’une jurisprudence constante

La Cour de cassation leur a donné raison et a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Paris. Elle a jugé, au visa de l’article L. 623-27-1 du code de la propriété intellectuelle, que : « En cas d’irrégularité, seules les mesures d’exécution de la saisie-contrefaçon qui en sont affectées et les mentions du procès-verbal qui relatent ces mesures, sont annulées.
7. Il en résulte qu’en cas de violation par l’huissier de justice des limites de l’autorisation donnée par l’ordonnance, la nullité du procès-verbal est limitée aux mesures réalisées en violation de cette autorisation ».

La Cour de cassation considère que la cour d’appel qui a prononcé l’annulation totale des procès-verbaux de saisie-contrefaçon a privé sa décision de base légale, dans la mesure où elle n’a pas précisé...

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