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Panorama rapide de l’actualité « Pénal » de la semaine du 4 septembre 2023

Sélection de l’actualité « Pénal » marquante de la semaine du 4 septembre.

le 12 septembre 2023

Droit pénal général

Application de la loi dans le temps et interruption des délais de prescription

  • Les juridictions d’un État membre ne sont pas tenues de laisser inappliqués les arrêts de la Cour constitutionnelle de cet État invalidant la disposition législative nationale qui régit les causes d’interruption du délai de prescription en matière pénale, en raison d’une atteinte au principe de légalité des délits et des peines tel que protégé en droit national, dans ses exigences relatives à la prévisibilité et à la précision de la loi pénale, même si ces arrêts ont pour conséquence qu’un nombre considérable d’affaires pénales, y compris des affaires relatives à des infractions de fraude grave portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne, seront clôturées en raison de la prescription de la responsabilité pénale. En revanche, les juridictions de cet État membre sont tenues de laisser inappliqué un standard national de protection relatif au principe de l’application rétroactive de la loi pénale plus favorable qui permet de remettre en cause, y compris dans le cadre de recours dirigés contre des jugements définitifs, l’interruption du délai de prescription de la responsabilité pénale dans de telles affaires par des actes de procédure intervenus avant un tel constat d’invalidité. (CJUE 24 juill. 2023, Lin, aff. C-107/23 PPU)

Droit pénal spécial

Contestation de crimes contre l’humanité : appréciation des éléments extrinsèques

  • Il appartient aux juges du fond, saisis de l’infraction de contestation de l’existence d’un ou plusieurs crimes contre l’humanité, prévue à l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, d’apprécier le sens et la portée des propos litigieux, au besoin, au vu des éléments extrinsèques à ceux-ci invoqués par les parties. Encourt dès lors la cassation, l’arrêt qui, pour relaxer le prévenu de ce chef et débouter les parties civiles de leurs demandes, énonce notamment que les propos poursuivis faisaient référence à une opinion défendue par celui-ci, tant dans un livre qu’à l’occasion d’émissions télévisées antérieurs, selon laquelle, si la déportation a moins touché les juifs de nationalité française que les juifs étrangers résidant en France, c’était le fait d’une action de Philippe Pétain en leur faveur et en déduit que ces propos n’ont, en conséquence, pas pour objet de contester ou minorer, fût-ce de façon marginale, le nombre des victimes de la déportation ou la politique d’extermination dans les camps de concentration. En effet, faute d’avoir procédé à l’analyse exhaustive des propos poursuivis, dont il résultait que le prévenu avait repris à son compte les propos qui venaient de lui être prêtés selon lesquels Philippe Pétain avait « sauvé les juifs français », les juges ne pouvaient retenir, au terme de leur examen des éléments extrinsèques invoqués en défense, sans mieux s’en expliquer, que cette affirmation devait être comprise comme se référant à des propos plus mesurés que le prévenu aurait exprimés antérieurement. (Crim. 5 sept 2023, n° 22-83.959, FS-B)

Diffamation

  • Appréciation de la bonne foi. Pour apprécier si l’excuse de bonne foi peut être retenue au bénéfice du prévenu poursuivi du chef de diffamation publique, il appartient aux juges, en premier lieu, d’énoncer précisément les faits et circonstances leur permettant de juger, en application de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, tel qu’interprété par la Cour européenne des droits de l’homme, si les propos litigieux s’inscrivent dans un débat d’intérêt général et s’ils reposent sur une base factuelle suffisante, notions qui recouvrent celles de but légitime d’information et d’enquête sérieuse, puis, en deuxième lieu, lorsque ces deux conditions sont réunies, si l’auteur des propos a conservé prudence et mesure dans l’expression et était dénué d’animosité personnelle, ces deux derniers critères devant être alors appréciés moins strictement. (Crim. 5 sept. 2023, n° 22-84.763, F-B)
  • Sort des actions devant la chambre de l’instruction. La chambre de l’instruction n’a pas compétence pour connaître des actions publique et civile relatives aux propos prétendus diffamatoires contenus dans le mémoire d’une partie produit devant elle. En revanche, en application de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 cette juridiction a compétence pour réserver de telles actions. (Crim. 23 août 2023, n° 23-83.480, F-B)

Logement : de nouveaux comportements incriminés par la loi anti-squat

  • La loi anti-squat a pour objectif de mieux protéger les propriétaires. Le squat du domicile d’autrui est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende (contre 1 an et 15 000 € auparavant) (C. pén., art. 226-4). Le nouveau délit d’introduction frauduleuse dans un local à usage d’habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende (C. pén., art. 315-1). Le maintien sans droit ni titre dans un local à usage d’habitation en violation d’une décision de justice définitive et exécutoire ayant donné lieu à un commandement régulier de quitter les lieux depuis plus de deux mois est puni de 7 500 € d’amende (C. pén., art. 315-2). En outre, la propagande ou la publicité, quel qu’en soit le mode, incitant ou facilitant le squat sont punies de 3 750 € d’amende. (C. pén., art. 226-4-2-1) (Loi n° 2023-668 du 27 juill. 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite)

Prostitution : recevabilité des requêtes contestant la pénalisation des clients

  • La Cour européenne des droits de l’homme a admis la recevabilité des requêtes de personnes, exerçant licitement la prostitution et se disant victimes de la pénalisation de l’achat d’actes prostitutionnels en ce qu’elle porterait atteinte à leur droit à la vie (art. 2), au respect de leur vie privée et familiale (art. 8) et heurterait le principe d’interdiction des traitements inhumains ou dégradants (art. 3). (CEDH 31 août 2023, MA et autres c/ France, n° 63664/19)

Sport : deux nouvelles contraventions sont intégrées au code du sport

Terrorisme : irrecevabilité des requêtes visant la responsabilité de l’État devant la Cour européenne

  • La requête des parents, veuve et fils mineur du caporal-chef A.C. assassiné par Mohamed Merah à Montauban en 2012, invoquant l’article 2 (droit à la vie) de la Convention, sous ses volets matériel et procédural, en raison d’un manquement allégué de la France à son obligation positive de garantir le droit à la vie, faute d’avoir pris les mesures nécessaires pour empêcher l’assassinat de leur proche, est déclarée irrecevable. (CEDH 13 juill. 2023, Chennouf et autres c/ France, n° 4704/19)

Travail : la sous-traitance fictive exclut la sous-traitance irrégulière

  • L’infraction prévue à l’article L. 8271-1-1 du code du travail de recours à la sous-traitance, par un entrepreneur, sans faire accepter le sous-traitant et agréer ses conditions de paiement par le maître de l’ouvrage, en violation des dispositions du premier alinéa de l’article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, ne peut être caractérisée en présence d’une situation de sous-traitance fictive. Encourt la cassation l’arrêt qui déclare les prévenus coupables de ce délit, tout en retenant leur culpabilité des chefs de travail dissimulé, prêt illicite de main-d’œuvre et marchandage, après avoir relevé que les personnes contrôlées en situation de travail étaient en réalité toutes employées par la société prévenue. (Crim. 5 sept 2023, n° 22-84.400, FS-B)

Vente en ligne d’objets ayant appartenu au IIIe Reich : quelle qualification pénale ?

  • Le fait de fixer et de diffuser l’image, par quelque moyen de communication que ce soit, d’uniformes, insignes ou emblèmes rappelant ceux d’organisations ou de personnes responsables de crimes contre l’humanité, fût-ce en vue de leur commercialisation, ne caractérise pas la contravention prévue à l’article R. 645-1 du code pénal mais pourrait, dans certains cas, constituer l’infraction d’apologie de crimes contre l’humanité, prévue à l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881. (Crim. 5 sept. 2023, n° 22-85.540, FS-B)

Viol : constitutionnalité de l’incrimination et de la répression du viol sur mineur de quinze ans.

  • Le premier alinéa de l’article 222-23-1 du code pénal et la référence « 222-23-1 » figurant à l’article 222-23-3 du même code punissant de 20 ans de réclusion criminelle tout acte de pénétration sexuelle ou bucco-génital commis par un majeur sur la personne d’un mineur de quinze ans, ou commis sur l’auteur par le mineur, lorsque la différence d’âge entre le majeur et le mineur est d’au moins cinq ans sont conformes à la Constitution. (Cons. const. 21 juill. 2023, n° 2023-1058 QPC).

Vol : la désactivation d’une alarme par un salarié est constitutive d’une ruse.

  • L’utilisation par un salarié d’un code, qui ne lui a été remis qu’à des fins professionnelles, pour s’introduire dans les locaux où est commis le vol caractérise la circonstance aggravante de ruse, au sens de l’article 311-5, 3°, du code pénal. (Crim. 5 sept. 2023, n° 22-86.256, F-B)

Justice

Adoption du projet de loi ordinaire d’orientation et de programmation de la justice pour 2023-2027

  • Adopté par l’assemblée nationale en première lecture le 18 juillet dernier, le projet sera examiné en CMP au mois d’octobre prochain.

Liberté d’expression et de communication des juges.

  • La révocation de ses fonctions de juge pour avoir communiqué à la presse les raisons de son opinion dissidente – déjà connue – avant la publication du texte intégral de la décision prise collégialement par la juridiction porte une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention européenne. (CEDH 18 juill. 2023, Manole c/ République de Moldova, n° 26360/19)

Peines et exécution des peines

BAR dans le cadre d’un SSJ : application de la loi dans le temps

  • Les dispositions des articles 132-45, 18° bis, et 132-45-1, du code pénal, issues de l’article 10 de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019, qui, combinées à l’article 763-3 du code de procédure pénale, permettent l’ajout, par le juge de l’application des peines, de l’obligation de porter un dispositif anti-rapprochement dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire, relèvent de l’article 112-2, 3°, du code pénal. Elles ont pour résultat d’aggraver la situation du condamné et ne s’appliquent donc pas aux condamnations prononcées pour des faits commis avant leur entrée en vigueur. (Crim. 6 sept. 2023, n° 22-84.919, F-B)

Liberté d’expression des détenus

  • La rétention par l’administration pénitentiaire de quatre numéros d’un journal adressé à des détenus est contraire à l’article 10 de la Convention européenne dès lors que ni les décisions des comités d’éducation ni celles rendues subséquemment par les juridictions internes ne permettent d’établir que ces juridictions ont effectué une mise en balance adéquate entre le droit des...

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