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Pas d’action en remboursement de l’assureur envers la victime réglée au-delà du plafond de garantie

Il résulte de l’article 1376, devenu 1302-1, du code civil que celui qui reçoit d’un assureur le paiement d’une indemnité à laquelle il a droit ne bénéficie pas d’un paiement indu, le bénéficiaire de ce paiement étant celui dont la dette se trouve acquittée par quelqu’un qui ne la doit pas. Encourt dès lors la cassation l’arrêt qui, alors que la condamnation de l’assuré à réparer le dommage des tiers lésés à une somme excédant le plafond de garantie n’avait pas été remise en cause, condamne ces derniers à restituer à l’assureur la portion de l’indemnité qu’il leur avait versée qui excédait le plafond de garantie.

La décision, qui n’emporte pas de réelle nouveauté, est l’illustration que les règles de droit commun servent couramment au règlement de litiges en droit des assurances.

Les faits et la procédure

Si les faits apparaissent assez simples, la procédure l’est un peu moins. Des plans d’eau appartenant à un couple sont exploités comme parcours de pêche par une société. Le site subit une pollution. Un jugement rendu en première instance a reconnu la responsabilité d’un groupement agricole. Se fondant sur le rapport de l’expertise judiciaire qui avait été ordonnée, propriétaires et exploitant ont assigné le responsable et son assureur pour être indemnisés.

Par un premier arrêt du 26 octobre 2010, devenu définitif, suite au désistement du pourvoi de l’auteur du dommage et de son assureur, une cour d’appel a statué sur l’indemnisation de certains préjudices. Rappelons ici que l’assurance de responsabilité civile est une assurance de dette, à la différence de ce qu’est l’assurance de choses. La dette de responsabilité de l’assuré est l’objet du contrat, quelle que soit la nature de la responsabilité (contractuelle ou extracontractuelle) et quel que soit le préjudice concerné (matériel, moral, immatériel…). Aux termes de l’article L. 124-1 du code des assurances : « Dans les assurances de responsabilité, l’assureur n’est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat, une réclamation amiable ou judiciaire est faite à l’assuré par le tiers lésé ». En l’espèce, une décision de justice a reconnu la responsabilité de l’auteur de la pollution.

Or, en application de l’article L. 113-5 du code des assurances, cette décision, qui constitue pour l’assureur de responsabilité la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue, du risque couvert, lui est opposable (Civ. 3e, 18 mars 2021, n° 20-13.915, D. 2021. 631 ; RDI 2021. 369, obs. C. Charbonneau ). L’assureur, condamné in solidum avec son assuré à indemniser l’exploitant, dans le cadre de l’exécution de cette décision, a réglé des sommes qui dépassaient déjà largement le plafond contractuel de garantie.

Suite au dépôt d’un nouveau rapport d’expertise, l’instance s’est poursuivie sur l’indemnisation des pertes d’exploitation subies par l’exploitant. Pour la cour d’appel (Paris, 8 oct. 2015), l’assureur a renoncé à se prévaloir du plafond de garantie et de la franchise prévus au contrat souscrit par l’assuré.

À l’appui de leur raisonnement, les juges parisiens ont constaté que dès le début du sinistre, l’assureur avait pris la direction du procès et assisté son assuré lors de toutes les opérations d’expertise et lors des instances judiciaires, jusqu’au pourvoi en cassation formé contre l’arrêt d’appel du 26 octobre 2010, dont il s’était ensuite désisté, qui le condamnait in solidum avec son assuré à payer des sommes qui dépassaient déjà largement le plafond contractuel de garantie et qu’il avait exécuté. Ce n’était donc que très tardivement, et alors même qu’il constatait depuis longtemps que l’exploitant formait des demandes dépassant largement le plafond de garantie prévu au contrat, qu’il l’avait...

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