Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Pas de régime dérogatoire pour les perquisitions dans les locaux d’un ministère

Le grief tiré de la méconnaissance de l’étendue de sa compétence par le législateur dans des conditions affectant le principe de la séparation des pouvoirs ne peut qu’être écarté, car il ne repose pas sur un droit ou une liberté garantis par la Constitution. Il s’ensuit que les dispositions du code de procédure pénale relatives aux perquisitions sont conformes à la Constitution, quand bien même elles ne prévoient pas de régime adapté aux opérations réalisées dans les locaux d’un ministère.

La décision du Conseil constitutionnel du 21 avril 2023 s’inscrit dans la procédure relative aux soupçons de prise illégale d’intérêts pesant sur l’actuel garde des Sceaux, déjà abondamment commentée (sur cette affaire, v. P. Januel, Éric Dupond-Moretti, avocat, ministre et renvoyé, Dalloz actualité, 4 oct. 2022). Les faits intéressant la décision sont connus : plusieurs perquisitions ont été réalisées au sein des locaux du ministère de la Justice. Le garde des Sceaux et ses conseils ont contesté leur validité. Dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, ils ont demandé à ce que la constitutionnalité des dispositions permettant la perquisition d’un ministère sans régime spécifique soit vérifiée. Pour les auteurs de la question, le législateur pourrait avoir méconnu sa propre compétence, ce qui serait susceptible de causer une atteinte disproportionnée à la séparation des pouvoirs. Par une décision d’assemblée plénière, la Cour de cassation a estimé la question nouvelle et a ordonné le renvoi devant le Conseil constitutionnel (Cass., ass. plén., 17 févr. 2023, nos 21-86.418, 22-83.930 et 22-85.784, Dalloz actualité, 7 mars 2023, obs. T. Scherer ; D. 2023. 582 , note M. Heitzmann-Patin et J. Padovani ).

L’audience devant le Conseil constitutionnel a eu lieu le 11 avril dernier (A. Bloch, Drôle d’audience sur une QPC du garde des Sceaux, Dalloz actualité, 12 avr. 2023), et la décision a été rendue dix jours plus tard. Sans surprise, le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions contestées ne méconnaissaient aucun droit ou liberté garanti par la Constitution.

L’audacieux grief soulevé par le requérant

Une différence fondamentale entre le contrôle a priori et le contrôle a posteriori doit être rappelée pour comprendre cette décision. Dans le premier cas, toute violation d’une disposition ou d’un principe à valeur constitutionnelle peut être invoquée. Ainsi, lors de ce contrôle, il est possible de soulever un grief tiré de la violation de la procédure législative, ou, par exemple, la méconnaissance de l’exigence constitutionnelle de transposition des directives. En revanche, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, le grief doit porter sur une atteinte à un droit ou une liberté garanti par la Constitution. En l’espèce, le requérant estimait...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :