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Précisions sur le régime du contentieux des saisies contestées dans le cadre d’une perquisition chez un avocat

Lorsque le demandeur au pourvoi est un tiers à la procédure à la date de celui-ci, le pourvoi en cassation formé contre l’ordonnance rendue par le président de la chambre de l’instruction, saisi d’une contestation portant sur des éléments saisis pour lesquels est invoqué le secret professionnel, a un effet suspensif jusqu’au prononcé de la décision de la Cour de cassation.

Ce magistrat, statuant sur renvoi après cassation, peut se voir présenter un nouveau moyen entrant dans le champ posé par l’article 56-1 du code de procédure pénale. En revanche, il n’est pas compétent pour statuer sur la régularité d’une commission rogatoire du juge d’instruction tendant à l’exploitation des éléments saisis en dépit de l’effet suspensif précité.

L’article 56-1 du code de procédure pénale, qui prévoit et encadre la perquisition dans un cabinet d’avocat, pose l’interdiction de toute atteinte au libre exercice de la profession d’avocat, et de toute saisie de document relevant de l’exercice des droits de la défense et couvert par le secret professionnel de la défense et du conseil. Cette disposition organise le « sous-contentieux » dans le cadre duquel le bâtonnier ou son représentant, qui assistent à la perquisition, peuvent s’opposer à la saisie de documents ou d’objets qui sont alors mis de côté dans l’attente d’une décision du juge des libertés et de la détention (JLD), puis – en cas de recours – du président de la chambre de l’instruction.

En l’espèce, un avocat a été mis en cause dans le cadre d’une enquête puis d’une information judiciaire. Au cours de cette information, le juge d’instruction a saisi le JLD afin qu’il autorise des perquisitions, notamment à son cabinet. Cette perquisition a donné lieu à la saisie du contenu du téléphone portable de cet avocat, transféré sur une clé USB. Elle a été contestée par le délégué du bâtonnier, motif pris de son caractère global.

Après réalisation d’une expertise aux fins d’extraction des éléments utiles à la manifestation de la vérité, correspondant tout de même à une liste de 330 mots-clés, le JLD a ordonné le versement à la procédure de cette sélection d’éléments.

Cette décision a été confirmée par le président de la chambre de l’instruction, mais par un arrêt du 5 mars 2024 (Crim. 5 mars 2024, n° 23-80.229, Dalloz actualité, 12 mars 2024, obs. T. Scherer ; D. 2024. 1218 , note P. Le Monnier de Gouville ; ibid. 1435, obs. J.-B. Perrier ; AJ pénal 2024. 281 ; RSC 2024. 453, obs. E. Rubi-Cavagna ), la Cour de cassation a cassé cette ordonnance et renvoyé le dossier devant cette même juridiction autrement composée. Cette cassation est intervenue en raison du fait que l’avocat s’était vu refuser, devant le président de la chambre de l’instruction, le droit d’être représenté par l’un de ses confrères, en méconnaissance de l’article 6, § 3, c), de la Convention européenne des droits de l’homme. Même si cela n’avait pas déterminé la cassation, il convient de souligner, pour la compréhension du présent pourvoi, que l’avocat n’avait pas non plus été autorisé à être représenté en première instance devant le JLD.

Post-cassation, le juge d’instruction a délivré une commission rogatoire aux fins d’exploitation des éléments saisis et a mis l’avocat en examen des chefs d’abus de confiance, escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé.

Plusieurs arguments ont été présentés devant le président de la chambre de l’instruction saisi sur renvoi, mais tous rejetés et examinés dans le cadre d’un pourvoi jugé immédiatement recevable, et aux termes d’un arrêt publié de la chambre criminelle de la Cour de cassation. C’est qu’en effet, de nombreuses questions en lien avec l’article 56-1 du code de procédure pénale, relevant essentiellement de la technique juridique, se posaient de manière inédite.

Sur l’effet de l’existence, dans la procédure, d’un débat JLD de première instance vicié pour s’être déroulé sans possibilité de représentation de l’avocat concerné

Selon le demandeur au pourvoi, le refus de représentation lui ayant été opposé devant le JLD devait, rétrospectivement – au vu de la solution dégagée dans l’arrêt de la Cour de cassation du 5 mars 2024 – avoir pour effet d’entraîner la nullité de l’ordonnance initiale. Le président de la chambre de l’instruction avait balayé cet argument au motif que l’avocat avait effectivement pu faire valoir ses droits « au travers notamment des mémoires successifs visés en procédure et auxquels il a été répondu ».

La Cour de cassation répond en deux temps : l’argument est bien recevable, mais il lui apparaît mal fondé.

D’une part, la Cour affirme qu’entre dans le champ de l’article 609-1, alinéa 2, du code de procédure pénale l’ordonnance du président de la chambre de l’instruction statuant sur le fondement de l’article 56-1 dudit code. Or, selon ce texte, « la compétence...

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