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La preuve par testing ne porte pas atteinte aux droits fondamentaux

La chambre criminelle refuse de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative au procédé de testing prévu par la loi en matière de discrimination, en précisant qu’il a vocation à faciliter la preuve des comportements discriminatoires et non à déroger aux règles qui encadrent la preuve en matière pénale.

par Cloé Fonteixle 25 février 2015

La discrimination est un délit prévu par les articles 225-1 à 225-4 du code pénal, dans un chapitre relatif aux atteintes à la dignité de la personne. Si les articles 225-1 et 225-2 définissent la discrimination comme une « distinction » opérée en fonction d’une série de critères, l’article 225-2 décrit les éléments constitutifs de l’infraction, en prévoyant qu’une discrimination est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsqu’elle consiste à refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ou à la subordonner à l’une des conditions prédéfinies, à entraver l’exercice normal d’une activité économique, à refuser d’embaucher, y compris en stage, à sanctionner ou à licencier une personne, ou encore à subordonner une offre d’emploi, une demande de stage ou une période de formation à l’une de ces conditions. Alors que l’article 225-3 exclut certains cas dans lesquels la distinction ne peut être considérée comme une discrimination, l’article 225-3-1, issu de la loi n°2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, dispose que « les délits prévus par la présente section sont constitués même s’ils sont commis à l’encontre d’une ou plusieurs personnes ayant sollicité l’un des biens, actes, services ou contrats mentionnés à l’article 225-2 dans le but de démontrer l’existence du comportement discriminatoire, dès lors que la preuve de ce comportement est établie ».

Ainsi, aux termes de ce texte, le fait que l’auteur de la discrimination ait fait l’objet d’une sollicitation non sincère, assimilable à une provocation, ne fait pas obstacle à la constitution de l’infraction. La formulation peut sembler maladroite, dans la mesure où elle mélange la notion d’admissibilité de la preuve et celle, substantielle, de constitution de l’infraction. Mais l’idée du législateur était bien d’autoriser de façon expresse le testing pour rechercher la preuve d’un comportement discriminatoire. Que cette technique soit envisagée comme une provocation à la preuve du délit ou à une provocation du délit lui-même, cette dernière interprétation semblant d’ailleurs commandée par la rédaction du texte, son admission légale s’inscrit dans un courant jurisprudentiel constant qui exclut l’application du principe de loyauté aux preuves apportées par des particuliers au juge pénal (V. Crim. 15 juin 1993, n° 92-82.509, Bull. crim. n° 210 ; D. 1994. 613 , note C. Mascala  ; Dr. pénal févr. 1994. 3, obs. Lesclous et Marsat ; 6 avr. 1994, n° 93-82.717, Bull. crim. n° 136 ; D. 1994. 155 ; RSC 1994. 776, obs. G. Giudicelli-Delage ; Gaz. Pal. 21 juill. 1994, p. 18, note Doucet ; 30 mars 1999, n° 97-83.464, Bull. crim. n° 59 ; D. 2000. 391 , note T. Garé ; Procédures 1999. Comm. 215, obs. Buisson ; RG proc. 1999. 640, chron. Rebut). Cette large admissibilité de la preuve en matière pénale trouve son fondement dans l’article 427 du code de procédure pénale, selon lequel, « hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction ». S’appuyant sur ce principe de la liberté de la preuve tout en rappelant l’exigence d’une discussion contradictoire des éléments versés par les parties, posée au second alinéa de ce même article, la chambre criminelle avait déjà été conduite, aux termes d’un arrêt de cassation, à valider le procédé du testing en matière de...

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