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Projets de loi coronavirus : les mesures visant les juridictions

Les projets de loi coronavirus, débattus aujourd’hui et demain par le Parlement, contiennent de nombreuses dispositions exceptionnelles : état d’urgence sanitaire, conséquences financières, sociales ou électorales… Les textes contiennent notamment plusieurs habilitations à légiférer par ordonnances qui concernent directement les juridictions.

par Pierre Januelle 19 mars 2020

Les projets de loi simple et organique d’urgence pour faire face à l’épidémie seront débattus aujourd’hui au Sénat, pendant que l’Assemblée étudiera le projet de loi de finance rectificative. Demain, les choses seront inversées. L’objectif étant d’adopter des textes conformes, les textes ne devraient plus évoluer après ce soir.

Adapter les règles des justices administrative et judiciaire

L’article 7 du projet de loi simple prévoit qu’afin de faire face aux conséquences de la propagation du virus, le gouvernement pourra prendre différentes ordonnances, qui devront être adoptées dans les trois mois. Ces mesures seront provisoires.

Une ordonnance permettra d’adapter, interrompre, suspendre ou reporter les différents délais imposés par la législation, à l’exception des mesures privatives de liberté et des sanctions. Ces mesures d’interruption seront applicables à partir du 12 mars et ne pourront excéder de plus de trois mois la fin des mesures administratives prises pour ralentir le virus.

Une autre ordonnance permettra d’adapter les règles des justices administrative et judiciaire, dans le seul but de limiter la propagation du virus. Sont visées les règles de compétences territoriales, de formation de jugement, de délais de procédure et de jugement, de publicité et tenues des audiences, de recours à la visioconférence et les modalités de saisine.

Par ailleurs, l’organisation du contradictoire devant les juridictions autres que pénales pourra être aménagée. Comme le précise le Conseil d’État, « ces adaptations ne pourront porter atteinte à la substance même des différentes garanties constitutionnelles ou conventionnelles qui régissent la conduite du procès ».

Toujours pour limiter les contacts physiques, l’alinéa suivant prévoit de modifier les règles relatives au déroulement de la garde à vue, pour permettre l’intervention à distance des avocats et la prolongation sans présentation devant un magistrat. Le déroulement et la durée des détentions provisoires et assignations à résidence sous surveillance électronique, seront également modifiés pour allonger les délais d’audiencement (3 mois en première instance, 6 mois en appel) et permettre une prolongation par une procédure écrite.

Enfin, les règles d’affectation des détenus devraient être assouplies, tout comme les modalités d’exécution des fins de peine, ainsi que, pour les mineurs, les mesures de placement et autres mesures éducatives.

À noter, le projet de loi organique prévoit de suspendre jusqu’au 30 juin les délais des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), que ce soit l’étude des QPC par le Conseil constitutionnel ou leur transmission par le Conseil d’État ou la Cour de cassation. 

Par ailleurs, les mandats des conseillers prud’hommes devraient être prolongés.

En droit des étrangers, une ordonnance spéciale devrait aussi allonger, jusqu’à six mois, les durées des différents titres de séjour et récépissés qui devaient expirer entre le 16 mars et le 15 mai.

Enfin, les délais applicables aux habilitations à légiférer par ordonnances prises par les précédents textes seront tous prolongées de quatre mois.