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Qualité à agir en référé des membres d’un groupement d’entreprises

Toute personne qui justifie d’un intérêt légitime au succès d’une prétention peut introduire une instance devant le juge des référés, auquel il appartient de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée d’un prétendu défaut de qualité du demandeur en référé, que la contestation de cette qualité par la partie adverse soit ou non sérieuse.

En l’absence de convention contraire, la désignation d’un mandataire auprès du maître de l’ouvrage, pour représenter les membres d’un groupement d’entreprises, que celui-ci soit conjoint ou solidaire, n’a pas pour effet de priver ceux-ci de la possibilité d’agir directement en paiement du coût des travaux réalisés, qu’il s’agisse, dans le cas d’un groupement conjoint, des travaux réalisés par l’entreprise demanderesse à l’action, ou, dans le cas d’un groupement solidaire, du paiement du solde global du marché.

La troisième chambre civile saisit, par cet arrêt rendu en section et publié au Bulletin, l’occasion de rappeler les contours de l’office du juge des référés et se prononce sur la faculté pour une entreprise membre d’un groupement, solidaire ou conjoint, d’agir en paiement contre le maître de l’ouvrage.

En l’espèce, dans le cadre de la construction d’un centre commercial, les sociétés maîtres de l’ouvrage confient la réalisation de travaux à un groupement d’entreprises avec mandataire commun.

L’une des entreprises, membre du groupement, assigne les maîtres de l’ouvrage devant le juge des référés aux fins de les voir condamner à lui verser une provision au titre de son solde de chantier. Une provision lui est accordée aux termes de la décision de première instance.

La cour d’appel, infirmant partiellement l’ordonnance du premier juge, dit n’y avoir lieu à référé, considérant que la détermination de la forme conjointe ou solidaire du groupement, ainsi que l’appréciation de l’étendue des pouvoirs de son mandataire, impliquent une interprétation des conventions conclues entre les parties et des textes légaux applicables. Elle en déduit l’existence d’une contestation sérieuse portant sur la « capacité à agir » (sic) de la demanderesse, excédant son office.

L’entreprise impayée introduit un pourvoi. Elle fait grief à l’arrêt de retenir des contestations sérieuses et de dire n’y avoir lieu à référé alors « que toute personne qui justifie d’un intérêt légitime au succès d’une prétention peut introduire une instance en référé et il appartient au juge des référés de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée d’un prétendu défaut de qualité du demandeur en référé, que la contestation de cette qualité par la partie adverse soit ou non sérieuse » ; mais encore « que sauf mandat spécial confié au mandataire commun d’un groupement momentané d’entreprises pour agir en justice au nom de ses membres, ces derniers ont qualité pour agir en paiement de leurs travaux contre le maître d’ouvrage, que le groupement en question soit conjoint ou solidaire ».

La Cour de cassation censure le raisonnement des juges d’appel et casse l’arrêt pour violation des articles 31 et 808 (devenu l’art. 834 depuis le décr. n° 2019-1333 du 11 déc. 2019) du code de procédure civile, rappelant au juge des référés qu’il lui appartient de trancher les fins de non-recevoir tirées d’un défaut de qualité à agir, et ce même si les contestations opposées par le défendeur quant à cette qualité sont sérieuses.

La cassation est également prononcée pour violation de l’article 809 (devenu l’art. 835) du même code, la Haute juridiction affirmant le principe selon lequel, quelle que soit la forme du groupement et sauf convention contraire, chacun de ses membres a qualité pour agir contre le maître de l’ouvrage en paiement des travaux réalisés malgré la désignation d’un mandataire commun ; la demande pouvant porter, en présence d’un groupement conjoint, sur les seuls travaux réalisés par l’entreprise demanderesse...

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