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Que faire lorsque la lettre de contestation d’une créance revient au mandataire judiciaire ?

Lorsque la lettre de contestation adressée par le mandataire judiciaire au créancier déclarant est revenue faute d’avoir été réclamée, la signification de l’acte qui s’ensuit n’a pas à reproduire l’article L. 622-27 du code de commerce, si la lettre de contestation signifiée par huissier de justice reproduit déjà le texte. Le recours du créancier contre l’ordonnance du juge-commissaire qui a suivi la proposition du mandataire judiciaire sera donc rejeté.

L’affaire concerne la société Jump XL (spécialisée dans les parcs d’attractions et parcs à thèmes), qui a été mise en sauvegarde le 29 septembre 2021 avec désignation d’un administrateur judiciaire. La société civile immobilière Icom, bailleresse de la société Jump XL, a déclaré une créance à titre privilégié le 19 novembre 2021. Par une lettre recommandée du 17 janvier 2022, qui comportait la reproduction des textes imposés par la loi, le mandataire judiciaire a indiqué au créancier que sa créance était contestée en son intégralité. Or, cette lettre lui est revenue avec les mentions « destinataire inconnu à cette adresse » et « non réclamée ». Le mandataire judiciaire l’a faite signifier le 8 mars 2022 par un acte d’huissier de justice (on reprendra ici les termes de l’arrêt, en dépit de la nouvelle appellation « commissaire de justice »), mais la signification ne reproduisait pas l’article L. 622-27 du code de commerce. Le 21 avril 2022, le juge-commissaire a rejeté la créance de la société Icom, et cette dernière a fait appel de cette décision.

À cette étape, la cour d’appel pouvait soit considérer que la signification avait fait courir le délai, le créancier était alors considéré comme n’ayant pas répondu dans le délai légal et son recours contre l’ordonnance du juge-commissaire qui a suivi la proposition du mandataire judiciaire était irrecevable ; soit elle jugeait que la signification n’avait pas fait courir le délai faute d’avoir reproduit l’article L. 622-27, auquel cas le créancier pouvait encore former un recours. La Cour d’appel de Versailles a déclaré le recours recevable, en retenant que l’acte de signification du 8 mars n’avait pu faire courir le délai de trente jours de l’article L. 622-27 faute de reproduction en son sein de cet article. Elle a estimé que la signification devait contenir l’article L. 622-27 et, faute d’être le cas, le créancier pouvait former un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire. Le moyen de cassation faisait valoir que les dispositions de l’article R. 624-1 s’appliquent à la lettre et non à la notification la portant à la connaissance du créancier.

L’arrêt du 18 avril 2023 est cassé et annulé en toutes ses dispositions – et, en application de l’article 625 du code de procédure civile, l’arrêt du 21 novembre 2023, qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire, est également cassé. Au visa de l’article R. 624-1, alinéa 2, du code de commerce, la Cour de cassation juge que la signification n’avait pas à reproduire l’article L. 622-27 du code de commerce, dès lors que la lettre de contestation signifiée par voie d’huissier de justice reproduisait déjà le texte. Les règles de contestation de la déclaration par le mandataire judiciaire avaient donc été respectées, et le recours formé par le créancier contre l’ordonnance du juge-commissaire n’aurait pas dû être déclaré recevable, d’où la censure de l’arrêt.

Pour bien comprendre ce débat passablement procédural, rappelons que l’article L. 622-27 du code de commerce est celui qui précise le délai dont dispose le créancier qui voit la créance qu’il a déclarée être contestée par le mandataire judiciaire, en vue de lui faire connaître ses observations. Il précise également que « le défaut de réponse dans le délai de trente jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire, à moins que la discussion ne porte sur la régularité de...

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