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Réaffirmation de l’incompatibilité entre l’infraction d’origine et son recel

Encourt la cassation l’arrêt d’une cour d’appel qui déclare le prévenu receleur du produit des infractions principales dont il est l’auteur.

par Méryl Recotilletle 30 mai 2022

En l’espèce, à l’issue d’une enquête sur la gestion d’une société placée en liquidation judiciaire par jugement, le gérant a été poursuivi devant le tribunal correctionnel. Les premiers juges l’ont relaxé du chef d’abus de confiance et condamné pour abus de biens sociaux, banqueroute, infractions à la législation sur les sociétés, recel d’abus de biens sociaux, recel de banqueroute, à douze mois d’emprisonnement avec sursis, 30 000 € d’amende et cinq ans d’interdiction de gérer ainsi qu’une mesure de confiscation et des intérêts civils. Le prévenu a relevé appel de cette décision. Le ministère public et la partie civile ont formé appel incident. En cause d’appel, les juges ont déclaré le prévenu coupable d’abus de biens sociaux et de banqueroute par détournement d’actif au préjudice de la société. Pour ce faire, ils ont retenu que le gérant avait volontairement financé les autres sociétés qu’il contrôlait sans respecter les procédures sociales et comptables exigées en tel cas, et ce en connaissance de cause, et que ces dépenses, poursuivies après la date de cessation des paiements, caractérisent des détournements d’actifs constitutifs de banqueroute. La cour d’appel a ajouté que les faits de recel étaient établis à l’encontre de ce dernier et des SCI dont il était le gérant.

Le pourvoi en cassation critiquait l’arrêt d’appel en ce qu’il a condamné pénalement et civilement le gérant mis en cause pour recel d’abus de biens sociaux et de banqueroute au préjudice de la société alors que nul ne peut être condamné pour recel du produit des infractions qu’il a commises. Il a également été reproché à la cour d’appel d’avoir, après relaxe du mis en cause du chef d’abus de confiance, débouté la partie civile de ses demandes alors que la faute civile pouvait être retenue à l’encontre de celui qui détourne un bien puisqu’il lui a été remis à titre précaire.

La cour d’appel pouvait-elle légitimement condamner le mis en cause pour recel des délits d’abus de biens sociaux et de banqueroute qu’il avait commis et rejeter les demandes de la partie civile ? La réponse est négative pour la chambre criminelle qui casse la décision de la cour d’appel, après avoir rejeté la condamnation pour recel des infractions d’origine.

Le recel, infraction de conséquence

Le recel fait partie des infractions dites de conséquence (v. P. Cazalbou, Étude de la catégorie des infractions de conséquence, LGDJ, 2016), lesquelles supposent une infraction d’origine. Selon une jurisprudence bien ancrée de la Cour de cassation, l’infraction de recel ne peut pas être retenue à l’égard de celui qui a commis l’infraction originaire dont provient la chose recelée : une même personne ne peut recevoir cumulativement la qualité d’auteur de l’infraction d’origine et la qualité d’auteur de l’infraction de conséquence (v. Crim. 15 déc. 1949, Bull. crim. n° 350 ; 2 déc. 1971, n° 71-90.215 P ; 10 oct. 1972, n° 72-90.505 P ; 6 juin 1979, n° 79-90.374 P ; 8 oct. 1998, n° 97-83.293, RSC 1999. 821, obs. R. Ottenhof ).

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